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vendredi 21 août 2020

LA QUÊTE DE LOUISE DESJARDINS

L’ŒUVRE DE LOUISE DESJARDINS est une magnifique entreprise de libération. Tous ses romans sont une quête d’identité qui exige une mutation de soi et de la société, une recherche d’espace et une affirmation de son être profond. Un vrai bonheur que de lire cette magicienne quand elle s’attaque aux grands problèmes sociaux par le biais du quotidien. Les petites décisions finissent par transformer la vie, par forger son existence en défrichant son chemin. Un parcours toujours un peu difficile, mais passionnant qu’elle explore encore une fois dans La fille de la famille. 

 

Le roman nous fait suivre une fillette d’une dizaine d’années qui découvre le monde. Elle a des yeux et des oreilles pour tout entendre et tout voir. Parallèlement, avec un saut dans le temps, nous partons avec la jeune femme. Après avoir terminé ses études, Louise se retrouve en Europe avec son amoureux, expérimente la liberté, démêle ce qui est vrai de soi dans une société où les balises étouffent souvent. Elle le sait. Le chemin des femmes est bien tracé et contribue à les enfermer dans un moule. 

Pas étonnant que le lecteur repasse sur des événements et des moments qu’elle a déjà racontés dans des publications antérieures. Ce voyage en Europe terminait La love. Il devient beaucoup plus important dans La fille de la famille. Les personnages changent de nom, mutent, mais tous gravitent autour de l’auteure qui dirige l’orchestre avec énergie. Et la voilà dans les méandres de sa vie, les grandes et petites frayeurs de son enfance. Louise Desjardins a l’art de transformer son quotidien et elle me donne toujours l’impression de plonger dans un roman d’aventures quand je la suis dans ses découvertes. 

Son expérience du monde prend son élan dans le Québec des années cinquante alors que la Belle province cherchait à secouer des carcans qui étouffaient les Québécois, particulièrement les femmes. Comment ne pas aimer sa mère et se méfier un peu de ce père colérique? Et ses frères doués pour inventer de nouveaux jeux et des mauvais coups. «La fille de la famille» partage ses bonheurs et ses chagrins, sa volonté d’être soi envers et contre tous. Chose certaine, elle refuse de chausser les souliers de sa mère et de ses tantes. Elle va étudier, tracer son chemin comme une grande, en souriant comme quand elle s’élance sur sa bicyclette toute neuve pour explorer les rues du vaste monde. Elle a vite compris que les liens du mariage étouffent. La jeune adolescente rouspéteuse est consciente surtout des sacrifices qu’a faits sa mère pour elle et ses frères. La petite fille veut faire ses choix, avoir sa «chambre à soi». Nous avons là les assises de l’œuvre de Louise Desjardins. 

 

ENFANCE

 

Tout commence en Abitibi. La fillette regarde aller sa mère et doit composer avec son père, ses départs, son impatience et sa mauvaise humeur. La fille de la tribu se sent terriblement seule au milieu de ces garçons turbulents qui l’ignorent dans leurs jeux. Elle m’a fait penser à ma sœur qui a dû se faufiler dans une fratrie de neuf mâles. Tous les jours, elle a dû s’imposer et jouer du coude. Louise devient le pivot de ce petit monde où le père reste une menace qui peut éclater au moindre prétexte.

 

Même si je suis contente de retrouver mon père quand il revient d’un long séjour dans les bois, je préfère qu’il soit absent. À peine est-il arrivé qu’il commence à s’en prendre à mes frères, surtout à l’aîné et à nous crier par la tête. À table, il m’arrive parfois de le contredire, et ça le rend furieux. Tais-toi, la Suffragette. Même s’il ne me touche pas, j’ai peur de lui. Je ne sais jamais s’il va hurler ou se moquer de moi, et je sens bien qu’il voudrait me donner une claque comme à mes frères. Vu que je suis une fille, il ne sait pas trop comment agir avec moi. (p.30)

 

Les chemins de la liberté passent par l’école. Sa mère trouve un emploi à l’extérieur pour payer le cours classique à ses enfants. Parce que le père ne gagne pas assez avec son travail en forêt. Il rapporte surtout des histoires que personne n’écoute. Une femme qui a dû oublier sa passion pour la musique et son talent pour se consacrer à sa famille. Tous étudieront le piano, elle y tient. Une forme de revanche certainement. 

 

ENFANCE

 

L’impression de me faufiler dans cette maison où la fille perturbe un peu la vie des garçons. La sensation de retrouver mon enfance, d’entendre ma mère se plaindre de la paroisse et de ses dépendances, d’être sur mes gardes quand mon père sortait de la forêt à Noël et au printemps chargé d’odeurs et de gomme de sapin, d’histoires qu’il prenait tant plaisir à ressasser avec mes oncles. 

Pas de grands drames, de parents monstrueux, alcooliques ou irresponsables. La vie simplement, le strict nécessaire, des événements dans une existence marquée par les saisons. Le père toujours un peu bougon, voulant dresser ses fils comme des petites bêtes rétives. Un homme de peu de mots. Ils l’étaient tous à l’époque. Mon père aussi était un silencieux quand il fumait sa pipe dans la berceuse où personne n’osait s’asseoir. Il avait sa chaise dans la cuisine. 

Louise Desjardins a l’art de décrire les petites choses de la vie, les mesquineries des enfants, certains propos qui blessent, des paroles qui se faufilent et marquent l’esprit. Des escapades aussi, la terrible aventure de traverser le parc de La Vérendrye la nuit pour surprendre un Montréal toute en maisons et en rues. 

Que de surprises, quand on peut vivre le bonheur de se forger une identité en parcourant les livres! Tout comme Louise Desjardins, l’entrée à l’école a été pour moi la plus formidable des libérations. J’échappais aux interdits de ma mère. Jusque-là, elle avait réglementé tous les aspects de ma vie. Je pouvais enfin me faire des amis. Le monde devenait plus vaste d’un coup et plein de merveilles au-delà de la galerie et de notre boîte à malle.

 

VOYAGE

 

Parallèlement aux grands et petits démêlés de l’adolescente avec ses parents, nous suivons la jeune femme en France avec Aimé, son amoureux. Ils vivent la vraie vie de couple même s’ils ne sont pas mariés. Certaines différences font surface. Lui ne songe qu’aux musées, qu’aux œuvres des maîtres. Elle préférerait partager des moments avec ces hommes et ces femmes qui prennent un verre dans le café du coin.

 

Voir Venise et mourir, je vais mourir, c’est certain. Je ronge mon frein, je dis d’accord, mais au fond, juste d’y penser, je suis déjà bien fatiguée. Dans le dédale des ruelles, on passe à côté de fruits multicolores, de gens qui savourent des caffè latte, tout ça me fait saliver. Mon guide commence sa tournée en lion au palais des Doges. On passe des heures à contempler les images peintes du Christ tout nu, de Venise et de ses canaux. À un moment donné, je déclare que j’en ai assez, que je veux aller voir en vrai les canaux et les palais. (p.27)

 

Le retour à Montréal, les nécessités de la vie et le travail s’imposent. Elle se retrouve professeur de français dans un séminaire où l’on vient d’accueillir les filles. Des règles désuètes sur l’habillement, les auteurs à l’index. Il faut la permission de l’évêque pour enseigner Gustave Flaubert. Ça peut faire sourire de nos jours, mais cette époque n’est pas si lointaine. Le scandale éclate quand le directeur apprend qu’elle vit avec son amoureux sans être mariée.

 

Chère mademoiselle, vous n’êtes pas sans savoir que cette façon de faire n’est pas en conformité avec la morale de l’Église, que c’est un péché grave. Le séminaire ne peut en aucun cas tolérer qu’un professeur vive ainsi en concubinage. J’ai pas vu de clause comme ça dans le contrat, mon père. C’est une question d’éthique, mademoiselle. (p.48)

 

Que choisir? Se marier, se trouver un appartement pour jouer à la fausse célibataire ou donner sa démission

Que de choses étonnantes pour un jeune lecteur! Ces aberrations par exemple. Le mari a droit à trois jours de congés lors de la naissance de son enfant. La mère non. J’ai connu ce genre d’étrangetés en arrivant dans le monde du journalisme. Le congé de maternité n’existait pas, les femmes étaient moins payées que leurs collègues masculins et les célibataires avaient un salaire moindre que celui des «chefs de famille». Temps révolu, heureusement même si certains nous ont imposé la fameuse «clause grand-père» où les jeunes gagnent moins que les plus anciens dans certaines entreprises.

 

LIBÉRATION

 

Le roman de Louise Desjardins illustre magnifiquement bien ces petites luttes quotidiennes qui font qu’une jeune femme gagne son indépendance. J’allais écrire la «tutelle de son corps et de son esprit». La fatalité biologique est insidieuse et l’aventure de la maternité peut devenir rapidement un piège. Aimé vit sa vie d’artiste, pendant que Louise enseigne, paie tout, se démène et n’arrive plus à savoir qui elle est. C’est à cette question que doit répondre «la Suffragette». 

Quand elle cerne bien sa situation, de grandes décisions s’imposent. Au seuil de la dépression, elle part en voyage, s’aère l’esprit au Népal, seule pour se refaire une santé psychologique. Une aventure qui la poussera vers sa première publication et sa vocation d’écrivaine.

 

De retour à Katmandou, j’écris des poèmes de sang et de ventre dans le jardin du Guest House. Des vaches sacrées circulent en liberté parmi les rickshaws, les temples bouddhistes et hindouistes, les autos fument en recrachant du fuel. Au fil des jours, le remords s’estompe. Si je n’étais pas venue au bout du monde, je serais dans un hôpital, ou fauchée par un camion, ou devenue une poignée de cendres éparpillées quelque part. (p.188)

 

Je l’ai déjà écrit. Louise Desjardins est une formidable conteuse qui possède l’art de vous entraîner dans les méandres de la vie, de vous retenir en vous faisant suivre tous les petits pas et les hésitations de ses personnages. J’ai eu l’impression encore une fois, tout au long de ma lecture, de l’entendre me murmurer à l’oreille, de rire à en perdre le souffle avec elle. Nous avons la certitude de retrouver une amie avec qui l’on peut tout partager quand on s'aventure dans un roman de Louise Desjardins.

 

DESJARDINS LOUISE, La fille de la famille, Éditions du BORÉAL, 200 pages, 21,95 $.

https://www.editionsboreal.qc.ca/catalogue/livres/fille-famille-2748.html

lundi 5 novembre 2012

Louise Desjardins est une vraie magicienne


Belle surprise que de retrouver Angèle dans «Rapide-Danseur» de Louise Desjardins. Cette femme, les lecteurs l'ont apprivoisée dans «Le fils du Che». Sa mère vient de mourir dans un accident d’auto. Un appel téléphonique nous permet de plonger dans les dernières années de cette survivante, de comprendre ce qu'elle fait en Abitibi, dans une maison héritée de sa tante.

Il y a un peu plus de deux ans, la jeune femme abandonnait son fils Alex à sa mère. Un geste désespéré, une question de survie. Les appels de son frère provoquent une plongée en soi, Angèle revit son arrivée dans ce pays, des rencontres, l’amitié avec Lucie, l’amour sans restriction de Magdelaine qui a vécu sa passion avec une autre femme, malgré le scandale qu’elle a provoqué à Val-Paradis. Un être libre, plein de ressources qui deviendra une autre mère pour elle.
«Puis en novembre 2002, j’ai pété les plombs et j’ai remis mon fils à ma mère, sa vraie mère, au fond, qui à son tour l’a remis à son père. Et j’ai pris l’autobus pour l’Abitibi. Mon fils ballotté doit se demander qui est sa mère. Il avait plus de douze ans quand j’ai repris son sort en mains, dans mes mains moites et molles pleines de pouces, qui ont laissé couler le peu d’amour qui aurait pu s’installer entre nous. Il avait quatorze ans quand je l’ai largué, il en a seize maintenant. De quoi a-t-il l’air?» (p.29)
La mort d’Anita foudroie Angèle. Elle n’arrive plus à bouger, happée par le drame de sa vie, son incapacité à décider quoi que ce soit.

Fuite

Est-ce un hasard? Angèle a pris la direction de Rouyn-Noranda, en Abitibi, le pays de son père. Elle avait fait un saut dans cette région que sa mère a toujours dénigrée alors qu’elle avait dix ans.
«J’aimerais que mon cerveau cesse de tourbillonner, de fouiller sans arrêt mon passé, pour comprendre enfin pourquoi je suis venue au bout du monde, au pays de mon père mort il y a presque trois ans maintenant, mon père que je n’ai pas vraiment connu même si j’ai habité sous son toit pendant plus de trente ans. J’étais une étrangère dans ma propre vie, ma propre famille, ma propre ville. J’étais une huître scellée, celle qu’on rejette parce qu’on n’arrive pas à l’ouvrir.» (p.30)
Peut-on renouer avec le passé, une famille inconnue? Tout commence mal chez l’oncle Normand, un irascible. Heureusement, Angèle croise des anges. Lucie la fait monter dans sa voiture et la jeune femme peut respirer. Elle retrouve Magdelaine, la sœur de son père, qui la prend sous son aile.
«Viens que je t’embrasse. C’était la première fois de ma vie que quelqu’un me faisait une telle étreinte, si enveloppante. Mais vous devez avoir froid, a fini par dire Magdelaine, se ressaisissant un peu. J’allais manger, justement, entrez dans la cuisine. Elle a enlevé son grand châle crocheté qui couvrait un tee-shirt immense et un jean serré.» (p.124)
Peu à peu, l’envie de vivre revient. L’amour surtout, ce dont elle a été privée depuis sa tendre enfance.

La mère

Peut-on abandonner son enfant, se déclarer inapte à la maternité?
«Les mères ne disent jamais à voix haute qu’elles n’aiment pas leurs enfants. Ça ne se fait pas. Je suis une mère inadéquate, je n’ai pas su materner mon enfant, l’allaiter, l’élever avec patience, lui lire des histoires avant de le border, comme dans «Tout se joue avant dix ans», non, je n’ai même pas lu cette bible que ma mère laissait traîner dans le salon. Inapte, a-mère, c’est exactement ce que je suis.» (p.31)
La culpabilité ronge Angèle. On se souvient du silence étouffant du roman «Le fils du Che». La fille méprisée et rejetée par sa mère, n’a pu donner ce qu’elle n’a pas reçu.
Que va faire Angèle? Partir à Montréal comme tout le monde le ferait ou attendre que le temps arrange tout, même mal. Elle est paralysée, comme toujours, quand il est question de sa mère.
Louise Desjardins crée un véritable suspense dans une sorte de huis clos où Angèle revit sa fuite et ce passé qu’elle a cru effacer. Toujours difficile de mettre le doigt sur des blessures d’enfance, mais combien fascinant. La jeune femme a pensé qu’il était possible de devenir une autre au bout du monde, dans ce village de Rapide-Danseur où la rivière ne se laisse jamais ligoter par les froids et la neige.
J’ai eu envie de relire «Le fils du Che» et de continuer avec «Rapide-Danseur». Tout se tient. Louise Desjardins est une magicienne qui nous possède d’un bout à l’autre de ce roman introspectif. Une formidable réussite.

«Rapide-Danseur» de Louise Desjardins est paru aux Éditions du Boréal.

jeudi 22 mai 2008

Louise Desjardins est une sacrée conteuse

Quand je m’aventure dans un nouveau roman de Louise Desjardins, inévitablement je m’arrête après quelques pages. Et là, je fais du surplace, me demandant dans quoi je m’aventure. Un doute s’installe. Si j’allais m’ennuyer dans cette histoire qui semble tellement ordinaire…

Et peu après, je me surprends à glisser sur les phrases, à ne plus pouvoir m’arrêter. Encore une fois, je suis aspiré par une forme de magie. Quelle conteuse! Cette enjôleuse possède l’art de vous retenir dans une histoire toute simple, qui pourrait être celle d’une voisine ou de quelqu’un de votre famille. Des figures s’imposent peu à peu. Comment ne pas s’attacher à Raoûl, Anita, Angèle et Alex, les personnages de son quatrième roman, «Le fils du Che».

Femmes

Angèle arrive mal à s’installer dans la vie. Il lui faudra tout l’espace du roman pour poser le geste libérateur, s’assumer avec ses forces et ses faiblesses. C’était aussi le cas de Katie McLeod dans «So long» et de Pauline Cloutier dans «Darling». Les personnages féminins de Louise Desjardins doivent se refaire une confiance et une vie après une grande secousse existentielle.
Angèle a vécu dans l’ombre de parents marxistes qui voulaient changer le monde. Ils pouvaient discourir pendant des nuits sur les tares du capitalisme, les inégalités entre les riches et les pauvres. Ils ont surtout négligé l’intime, le personnel et la tendresse, se payant des aventures en dehors du couple, vivants en porte-à-faux. La jeune femme a vécu un amour avec Miguel, un Chilien d’origine. Après une aventure de quelques semaines, elle s’est retrouvée enceinte. Elle a gardé l’enfant, ce fils qu’elle n’est pas certaine d’aimer, incapable de coller à l’image de la mère que la société esquisse. Alex, adolescent solitaire, muet presque, communique secrètement avec Lola, la petite voisine d’en face, par le biais de l’ordinateur. Tout comme Angèle qui «tchatte» avec des dizaines de personnes partout dans le monde et qui biffe l’interlocuteur quand l’échange risque de prendre une touche personnelle.
Rapidement, on glisse dans une histoire où l’on communique que par le biais de machines de plus en plus sophistiquées. On peut se confier à «une amie» qui vit en Palestine sans craindre la rencontre ou le face à face. Une manière de basculer dans une fausse communication et d’oublier le monde autour de soi. La solitude étouffe Alex qui peut devenir dangereux quand les mots surgissent comme un torrent.
«Alex se lève et se dirige vers sa mère, furieux, comme s’il allait la frapper. Elle s’enfuit dans la cuisine. Elle se met à pleurer, il la suit. Il se calme un peu, puis les questions fusent enfin comme une salve de canon. Il n’a jamais tant crié, il se sent étourdi, il va tomber par terre si les mots continuent de sortir, il tangue, il a besoin d’atterrir quelque part parce qu’il va disparaître dans les airs tel un cerf-volant sans ficelle.» (p.79)

Communications

Derrière Angèle et Alex se profile la grande question contemporaine. Les ordinateurs et leurs possibilités de contacts planétaires finissent-ils par créer des asociaux qui ont besoin de thérapies pour reprendre contact avec la vie? Pour Alex, sa recherche du père devient obsédante et l’aspire. Touchant, émouvant. Ce mâle souvent absent dans notre littérature prend des traits fort sympathiques avec Miguel qui refait surface et tente de guérir la blessure de son fils.
Nous glissons du privé au public et notre lecture prend une autre couleur. Nous ne sommes plus dans la banalité des choses.
«Oui, se dit Angèle, les guerres civiles ont priorité sur les guerres familiales. À cause du sang qui coule, des bombes qui éclatent. C’est facile à comprendre, mais si seulement j’arrivais à bien organiser mon petit sang qui ne coule pas, mes petites bombes qui n’éclatent pas. Si seulement tout le monde arrivait à bien gérer sa vie, ses conflits intimes, il n’y aurait peut-être pas de génocides ni toutes ces cochonneries qui nous empoisonnent l’existence même si on ne les voit qu’à la télévision.» (p.156)
Les romans de Louise Desjardins finissent toujours par nous aspirer. Ils visent juste et questionnent malgré leur «incroyable apparence de légèreté».

«Le fils du Che» de Louise Desjardins est publié aux Éditions du Boréal.