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jeudi 6 décembre 2007

La décentralisation relancera-t-elle le Québec?

On ne peut reprocher à Roméo Bouchard de manquer de suite dans les idées. Au cours de la dernière année, il a signé deux ou trois ouvrages qui permettent de réfléchir au développement du Québec. Après s’être demandé si les régions ont un avenir, analysé la marche de la Belle province depuis la Révolution tranquille, il s’est attardé à l’énergie éolienne et à la main mise des multinationales sur une richesse qui fait rêver bien des dirigeants régionaux.
Avec des collègues de la «Coalition pour un Québec des régions», il se penche dans «Libérer les QuébecS», sur la décentralisation et la représentativité qui font les manchettes depuis trente ans. Des idées que les élus s’empressent d’oublier une fois installés à l’Assemblée nationale.
Ce que propose la Coalition pour un Québec des régions, (signalons la participation de Marc-Urbain Proulx et Denis Trottier à cet ouvrage) est «ni plus ni moins qu’une deuxième Révolution tranquille, axée sur la réappropriation du territoire et de la gouvernance par les citoyens et les communautés, un État régionalisé et démocratique.»
Les rédacteurs évoquent René Lévesque qui établissait les grandes lignes de sa pensée dans «un livre blanc sur la décentralisation» publié en 1977. Il rêvait d’un Québec plus près de ses citoyens. «Un vaste projet collectif qui renouvellera notre façon de vivre en société et de s’administrer», écrivait-il. Pour des raisons technocratiques et politiques, le projet a été étouffé dans l’œuf. Une résistance qui dure depuis une trentaine d’années, qu’importe les partis politiques qui se succèdent à l’Assemblée nationale. Le Québec est un état «l’un des plus centralisés au Canada et dans le monde» où l’on prend plaisir à confondre «réaménagement» et «restructuration» avec «décentralisation».
«La «décentralisation», c’est un mot technocratique. Le vrai nom, c’est: «démocratie régionale». Comme dans toutes les formes de démocratie, le cœur de l’affaire, c’est le pouvoir citoyen. Ce n’est pas d’abord une affaire de structures, de services, ni de budgets, c’est une affaire d’aménagement de l’État par un transfert de pouvoirs vers les citoyens.» (p.45)

Scrutin proportionnel

Pour relancer la vie économique et politique du Québec, le collectif n’oublie pas le «scrutin proportionnel» qui fait consensus dans la population depuis des décennies. Roméo Bouchard va plus loin en prônant une «politique d’occupation du territoire».
Tous s’entendent pour remanier, restructurer, abolir certains organismes, se pencher sur les cartes des régions administratives et faire en sorte que les gens soient près du pouvoir et aient leur mot à dire. Sans jamais perdre de vue des habitudes et des manières de faire.
On suggère d’élire les préfets des MRC et les dirigeants de la Conférence des élus au suffrage universel. Il est assez étonnant de retrouver des maires et des conseillers à la CRÉ ou à la MRC sans que la population se prononce. On a vu les tiraillements à la MRC Lac-Saint-Jean Est lors de l’élection d’un préfet. La polarisation des secteurs nord et sud n’a jamais été aussi forte et la lutte laissera des séquelles.

Le point

Une belle manière d’explorer des pistes et de secouer un Québec qui, économiquement et politiquement, va de crise en crise sans arriver à se sortir d’un malaise qui frappe tour à tour la forêt, l’agriculture et provoque le dépeuplement des régions.
La «Coalition pour un Québec des régions» propose une mobilisation des jeunes et des citoyens qui sont de plus en plus indifférents à la gestion publique, croyant qu’il est impossible de changer quoi que ce soit. Elle propose aussi d’enchâsser cette nouvelle façon de faire dans une constitution typiquement québécoise. Les nations autochtones sont également conviées à participer à cette démarche démocratique en véritables partenaires. Un beau défi, une façon de relancer «les pays du Québec» qui se heurtera, on peut le parier, aux courtes vues des politiciens et à un appareil étatique allergique aux changements.
«Libérer les QuébecS» fait le point sur un sujet qui revient de façon endémique dans les discours des politiciens depuis trente ans.

«Libérer les QuébecS»; Décentralisation et démocratie, Coalition pour un Québec des régions est paru aux Éditions Écosociété.