Mathieu Bock-Côté est
quelqu’un, je l’avoue, qui me déstabilise quand je le vois à la télévision. Cet
homme parle plus vite que son ombre et me heurte souvent avec ses propos. Il défend
ses idées avec âpreté, pour ne pas dire avec une passion qui peut étourdir.
Son
passage à «Tout le monde en parle» m’a laissé perplexe. Rien pour me précipiter
vers «Fin de cycle, aux origines du malaise politique québécois». Bel
euphémisme que de parler d’un «malaise québécois» devant le comportement du premier
ministre Jean Charest envers les manifestations qui reviennent comme les matchs
de la coupe Stanley. Nous connaissons présentement une remise en question
importante où des conceptions de la société se heurtent.
Pour le sociologue, la pensée
qui a permis la Révolution tranquille au Québec doit être questionnée. Sinon,
le Parti québécois risque de disparaître. Comment lui donner tord? Le taux
d’insatisfaction envers Jean Charest atteint des sommets et les intentions de
vote envers le Parti québécois stagnent.
Il a fallu que Gilles Duceppe
soit mis en échec par une manœuvre qui semble douteuse pour que Pauline Marois
se refasse une santé politique. La «femme de béton», après une embellie dans
les intentions de vote, semble avoir du mal à se détacher même si le parti de François
Legault a vécu une plongée vertigineuse.
Et que dire du «virage orange»
qui a mis le Bloc québécois au rancart? Désir de changement ou fatigue
d’entendre des discours qui se répètent?
Situation
Pour Mathieu Bock-Côté les
gauchisants ont fait main base sur le nationalisme et ont tourné le dos au
passé des Québécois. Le plus bel exemple de cette idéologie se retrouve dans le
système d’éducation. L’égalitarisme s’impose au détriment des valeurs traditionnelles.
La société multiculturelle de Trudeau se retourne presque toujours contre les francophones.
La droite de son côté considère
l’État comme une entreprise et les hôpitaux comme un centre de villégiature.
L’individualisme fait foi de tout au détriment du collectif. L’équilibre
budgétaire devient un dogme de foi.
La Coalition pour l’avenir du
Québec est l’exemple de cette vision «privée» de la société. Son programme
politique se résume essentiellement à détruire certaines institutions.
Conservateur
Mathieu Bock-Côté affirme
être conservateur tout en rejetant les idées de droite et les doctrines de
certains gauchistes. Il revendique le nationalisme qui a permis au Parti
québécois de René Lévesque de prendre le pouvoir en 1976. Ce dernier avait
réussi à créer une coalition avec les créditistes et les radicaux qui venaient
du Rassemblement pour l’indépendance nationale.
D’une certaine manière
Mathieu Bock-Côté me démontre que je suis un tantinet conservateur même si les
politiques de Stephen Harper m’horripilent. Comment peut-on approuver la légalisation
du pillage des écrivains avec le projet de loi C-11? Conservateur parce que je
me méfie des visions étatiques comptables et des approches transversales et
latérales en éducation. Le but de ces réformistes: inventer une société
égalitariste, laïque, permissive, ouverte, fourre-tout qui tourne le dos à
notre histoire nationale. Une société qui oublie son passé et son histoire.
Cela peut expliquer pourquoi la littérature québécoise est si peu présente dans
les écoles. Table rase pour mieux s’assimiler et disparaître peut-être.
Pourquoi pas l’enseignement de l’anglais à la maternelle tant qu’à y être?
Mathieu Bock-Côté a le grand
mérite de secouer des mythes et des idéologies qui peuvent mettre en danger la
survie des Québécois francophones. Il lance de bonnes questions. Doit-on tout
brader au nom de la modernité?
Une réflexion importante dans
une société en ébullition qui résiste à toutes les décisions du gouvernement
Charest depuis quelques années. Que l’on songe au développement de l’éolien, aux
gaz de schiste et au plan Nord, les élus ont dû ramer contre la volonté du
peuple. Il y a certainement une fracture de plus en plus grande entre toute une
population et ses représentants.
Chose certaine, nous vivons
de grands bouleversements et le ton est donné, je crois, par la jeunesse qui cristallise
ce ras-le-bol que pas un parti politique n’arrive à canaliser. Doit-on s’en
réjouir ou s’apitoyer? Mathieu Bock-Côté s’élève au-dessus de la mêlée et c’est
fort heureux. Il réussit à le faire dans la frénésie de l’actualité et dans une
société en manque de leadership.
«Fin de cycle, aux origines du malaise politique québécois»
de Mathieu Bock-Côté est paru aux Éditions du Boréal.