Les colonies américaines, entre autres, ont utilisé cette main d’œuvre pour la culture du riz, de la canne à sucre et de l’indigo.
Aminata vit auprès de sa mère, une sage-femme, et de son père joaillier. Elle apprend le métier auprès de sa mère même si elle est encore une fillette. Tout serait bien s’il n’y avait cette menace qui plane sur le pays.
«C’était une époque troublée et, sans tous les bouleversements, le mariage entre un Peul et une Bambara n’aurait jamais été permis. Des personnes disparaissaient et les villageois, craignant de tomber aux mains des ravisseurs, formaient de nouvelles alliances avec des villages voisins. Chasseurs et pêcheurs se déplaçaient en groupes. Pendant des jours et des jours, des hommes construisaient des murailles autour des villes et des villages.» (p.25)
Aminata est capturée lors d’une rafle. Son père et sa mère sont égorgés.
S’amorce alors un périple qui durera des mois. Enchaînés, ils doivent marcher vers l’océan Atlantique malgré la pluie, la chaleur, la faim et la maladie. Enfants et femmes enceintes font partie de cette incroyable odyssée. L’une accouche pendant le périple et doit continuer. Animata croit vivre l’enfer, mais elle comprend vite que le pire est à venir. Ils sont entassés dans la cale des navires, enchaînés l’un à l’autre. La maladie, la mort frappe à tous les jours et les cadavres sont jetés à la mer. On leur sert un peu de nourriture dans des auges et des chaudières. Il faut imaginer la senteur des excréments et des cadavres qui colle aux flancs de ces navires. Plusieurs captifs perdent la raison.
La jeune fille s’en tire un peu mieux que les autres. Le médecin la prend sous sa protection et la garde dans son lit. La fillette assiste aux ébats de ce dernier avec les esclaves à tous les soirs ou presque. Elle réussit à se nourrir et aide les autres du mieux qu’elle peut.
Amérique
Elle survit à la traversé et est vendue à un producteur d’indigo qui exploite un domaine près de Charles Town ou Charleston en Caroline du Sud. Elle réussit à se faire une vie en aidant lors des accouchements. Les Noires et certaines Blanches. Elle pense connaître un certain bonheur en épousant un compagnon de traversée. C’est sans compter la convoitise des maîtres qui « aiment bien » les belles esclaves. Son fils lui sera enlevé et vendu. Animata sera achetée par un Juif avec qui elle apprendra la tenue des livres et la littérature. La lecture et l’écriture restant interdites aux esclaves.
Lors de la guerre d’indépendance des Américains, beaucoup de Noirs ont pris le parti des Britanniques en échange de leur liberté. Ils se retrouvent en Nouvelle-Écosse où on leur a promis la liberté et des terres. Des promesses qui ne seront jamais tenues.
«Ils s’étaient servis de nous de toutes les façons pendant leur guerre. Cuisiniers. Prostituées. Sages-femmes. Soldats. Nous leur avions donné notre nourriture, notre lit, notre sang, nos vies. Et lorsque les propriétaires d’esclaves arrivaient avec leurs histoires et leurs papiers, les Britanniques nous tournaient le dos et les autorisaient à se saisir de nous comme de la marchandise. Notre humiliation ne voulait rien dire pour eux, ni nos vies.» (p. 363)
Animata garde espoir pourtant de retrouver son mari et sa fille May qu’on lui a enlevée. Elle embarque dans le rêve de fonder une colonie libre au Sierra Leone. Ce retour en Afrique la hante depuis toujours. Là encore, malgré la meilleure volonté de quelques Britanniques, les engagements ne seront pas tenus.
Abolitionnistes
Animata finira en Angleterre pour appuyer la lutte des abolitionnistes. Elle connaîtra la célébrité et rédigera ses mémoires tout en ayant la chance de retrouver sa fille.
Lawrence Hill a effectué un travail magistral, s’appuyant sur des faits historiques et des personnages réels pour ancrer l’histoire d’Animata. Une tache sur la mémoire de l’Occident où des millions de personnes ont trouvé la mort dans ce commerce ignoble. Un racisme qui va au-delà de l’entendement. « Animata » fait comprendre et voir l’horreur de l’esclavage. Une tache qui marque à jamais l’histoire de l’Occident. À lire absolument.
« Animata » est paru aux Éditions de la Pleine lune.