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lundi 7 avril 2025

LE MONDE D’HEATHER O’NEILL EST CRUEL

J’AI À PEU près tout lu de Heather O’Neill depuis sa première publication en 2007. Elle n’a cessé de me surprendre depuis et de m’entraîner dans des univers singuliers. Une écrivaine qui n’hésite jamais à sortir des sentiers battus, qui étonne grâce aux traductions de Dominique Fortier. Et voilà La capitale des rêves avec une page couverture qui pourrait être celle d’un livre pour enfants. Une jeune fille bondit dans les bois aux côtés d’une oie qui va toutes ailes déployées. C’est frais, un peu naïf, et surtout sans malice, presque joyeux. Le titre accentue cette impression. Comme si l’éditeur avait cherché à nous faire oublier les moments plutôt sombres que la planète vit depuis des semaines. Sofia, la seule enfant d’une écrivaine connue et adorée dans l’Élysée, une féministe qui n’hésite jamais à pourfendre les hommes et à dénoncer toutes les injustices, devient une cible quand son pays est envahi par le voisin, vaincu militairement. On ne peut s’empêcher d’évoquer l’Ukraine qui subit les agressions russes depuis des années. Le conquérant écrase tout et élimine les dissidents et les récalcitrants. On s’en prend à la culture, les livres sont brûlés sur les places publiques et tous les monuments abattus. La terreur dans ce qu’elle a de plus terrible. 

 

Clara Bottom, l’écrivaine reconnue, la mère de Sofia, lui confie son dernier manuscrit et lui demande de le faire passer à l’étranger. Pour dire au monde les atrocités que les Élyséens vivent. Une manière d’informer les pays libres des exactions et des massacres que la population de l’Élysée subit au jour le jour.

La jeune fille doit monter dans un train qui emporte les enfants de la capitale vers un endroit inconnu. Elle s’échappe par miracle. Plus tard, elle apprendra que tous ceux et celles qui étaient entassés dans les wagons ont été éliminés. Ce n’est pas sans rappeler les terribles convois de la mort des nazis. C’est comme ça tout au long de la lecture du roman de madame O’Neill. Impossible de ne pas faire des liens avec l’actualité et les horreurs d’un passé pas si lointain. 

 

«— Bien sûr que ce livre est plus important que toi. Ce sont mes mémoires, oui. Mais il compte aussi plus que moi. C’est une célébration de la vie élyséenne. Aucun de nous n’est irremplaçable en temps de guerre. C’est l’idée même de liberté qui doit être sauvegardée. La culture que nous avons créée. Si nous pouvons garder cela en vie, nous sommes sauvés. Nos sorts individuels n’ont aucune importance. Ne pense pas à toi. Pense au livre. Il doit sortir du pays.» (p.12)

 

Sofia prend sa mission au sérieux et se retrouve en compagnie d’une oie qui parle et qui se targue d’être philosophe. Elle souhaite publier un manifeste qui va secouer le monde littéraire. 

 

MARCHE

 

Sofia tente, dans un premier temps, de rejoindre sa grand-mère retirée à la campagne, presque au milieu de la forêt. Une paysanne qui vit près de la nature et des bêtes, un peu sorcière et guérisseuse. Elle se débrouille comme elle peut avec l’oie et ils deviennent rapidement des inséparables. Ensemble, elles peuvent affronter tous les dangers et triompher de toutes les embûches. 

Nous voilà dans un conte où le réel prend toutes les formes et présente d’étranges contours. Une allégorie où le concret et l’imaginaire se tendent les bras et tourbillonnent dans une danse ensorcelante. L’oie s’avère savante et sérieuse, un peu précieuse même et s’exprime dans une langue châtiée. Les mots ont beaucoup d’importance dans la fable de madame O’Neill. Surtout, ils ne sont pas fiables ou figés. Tout est magique et surréel dans La capitale des rêves. La forêt est habitée par des êtres fantasmagoriques qui se transforment selon les circonstances. Les arbres prennent l’aspect des humains et peuvent être bienveillants ou dangereux. Les bêtes mutent comme elles le font toujours dans les contes.

 

«Dans le noir, les bois acquéraient de nouvelles propriétés. Elle ne pouvait s’empêcher de croire ce que ses autres sens lui disaient.

Un arbre arracha ses racines de la terre, tel un enfant qui sort ses pieds de ses bottes en caoutchouc. Puis il se mit à courir à ses côtés. Des chevaux gris galopaient devant. Un gros ours grogna au bord de la route. Des oiseaux volaient près de sa tête.» (p.127)

 

Tout le récit est fait de plongées et de retours dans le passé. Sofia, la narratrice, est obsédée par son enfance, l’amour et la haine presque qu’elle éprouve pour sa mère. La fillette a l'impression d’avoir été un fardeau pour Clara. Du moins c’est ce qu’elle imagine. 

Ce n’est jamais facile d’avoir une mère qui n’en a que pour son œuvre et les grandes causes. Sofia croit que Clara a toujours pris toute la place et ne lui a laissé que des miettes. Les idoles ont fait de l'ombre à leur progéniture et les liens qui les unissent s’avèrent particulièrement difficiles. C’est du moins ce que j’ai cru au début, mais tout n’est pas aussi simple.

 

«Sa mère ne se livrait pas souvent ainsi à des réminiscences. Elle estimait que les femmes ne devaient pas révérer leur jeunesse en la tenant pour le point culminant de leur vie. Elle soutenait que les femmes n’entraient pas dans la fleur de l’âge avant la cinquantaine, à la ménopause.

«Montre-moi», ordonna Sofia debout devant sa mère, mains sur les hanches et torse bombé, imitant un soldat.

Clara regarda Sofia. Elle l’enlaça et commença à danser avec elle qui se tenait sur la pointe des pieds. Sa mère n’était pas grande, mais la tête de la jeune fille reposait tout de même sur son giron doux.

Sofia ne se rappelait pas la dernière fois que sa mère l’avait prise dans ses bras. Dehors, un haut-parleur avertissait les citoyens qu’un couvre-feu était en vigueur et qu’il était temps de rentrer.» (p.159)

 

Clara est une femme remarquable qui défend sa liberté et celle des autres avec toute sa fougue et son énergie. Tout le contraire de Sofia, qui prend plaisir à se diminuer et à se faire invisible. 


SUJETS

 

Une belle occasion pour Heather O’Neill d’aborder les grands enjeux politiques, les obsessions qui provoquent souvent des guerres. L’écrivaine s’attarde à la nation, la liberté collective et individuelle, la nécessité de la culture, des livres et de la littérature qui unissent ou séparent les femmes et les hommes, les régimes qui écrasent les citoyens ou qui leur offrent des espaces d’autonomie. L’amour, bien sûr, les liens entre tous, ses droits et ceux des autres et des obligations qui découlent de la vie en société. Et surtout, les contacts et les rapports qui se tissent entre les parents et les enfants, entre une mère et une fille. Le père dans cette fable d’Heather O’Neill est totalement absent.

 

«— Tu ne peux pas croire que les hommes sont de ton côté, dit Sofia, désemparée devant les faussetés qu’énonçait Céleste. Ils ne sont jamais de ton côté. Pas vraiment. Aucun d’entre eux! Il n’y a aucun homme à qui on puisse faire confiance en temps de guerre. Je me suis fait mettre à la porte de la maison de ma grand-mère par deux garçons. En plus, ils venaient de notre pays. Ce n’étaient même pas des ennemis.» (p.205)

 

Comme dans tous les contes, l’action va au-delà du bien et du mal. C’est souvent d’une cruauté dérangeante. Chacun pense à soi et personne n’hésite à trahir ses proches pour sauver sa peau. La grandeur et le sacrifice prônés par la mère de Sofia ne tiennent plus. La survie prend toute la place. Sofia, avec ses concitoyens, devra faire des choix terribles.

 

MUTATION

 

Nous voyons la petite fille muter en adolescente et en femme. Elle sera déçue et trompée quand elle fera confiance aux autres. Et la magie du pays et de l’environnement, la parole de son amie l’oie disparaîtront avec la poussée des hormones et son entrée dans la vraie vie. Comme si le féérique et le magnifique ne pouvaient exister que dans l’enfance. Les adultes ne sachant qu’engendrer l’horreur pour se venger peut-être d’avoir perdu leur pouvoir d’émerveillement.

 

«Sofia déglutit, et le liquide coula dans son gosier comme si elle avait avalé un poisson rouge. Sa poitrine la brûla et sa tête lui fit l’impression d’être une ampoule qu’on vient d’allumer. Son cœur rayonnait comme celui de Jésus dans les statues et sur les peintures à l’église. C’était merveilleux. Elle éclata de rire. Et on aurait dit que le rire ne sortait pas de sa bouche, mais qu’il venait d’ailleurs, de plus loin, qu’il avait traversé un mur, ou qu’il venait d’une chambre à l’étage.» (p.294)

 

Les humains se montrent particulièrement fourbes, profiteurs, égoïstes et dangereux. Une société qui donne des frissons dans le dos. Un conte qui vous laisse étourdi et un peu dépité devant l’aveuglement de tous. Mais comment donner tort à Heather O’Neill quand on regarde le monde s’enrayer et que les dirigeants nous matraquent avec des idées farfelues et absurdes? Un roman percutant qui nous fait grincer des dents et voir les soubresauts du quotidien d’un autre œil. Une fable actuelle qui nous ramène à nous et à nos démences meurtrières. 

 

O’Neill Heather : La capitale des rêves, Éditions Alto, Québec, 400 pages. 

https://editionsalto.com/livres/la-capitale-des-reves/

jeudi 23 janvier 2025

ANNE MICHAELS MET LE DOIGT SUR L’ÂME

ANNE MICHAELS propose un roman qui étonne et subjugue. Étreintes nous plonge dans une période qui va de 1910 à 2024 et se déploie dans une douzaine de tableaux en France, en Angleterre et en Finlande. Des personnages intenses, fascinants et surtout, des moments où certains touchent l’être dans ce qu’il a de plus pur et de plus dense, quand les colères et les folies meurtrières s’apaisent. L’écriture d’Anne Michaels nous fait vivre un tremblement d’être qui transforme les regards sur le monde et secoue des certitudes. Une méditation sur les magnifiques et terribles pérégrinations de la vie malgré les horreurs et les épreuves. Personne ne sort indemne de ce grand tremblement d’intelligence, d’empathie et d’amour pour les autres que nous présente cette écrivaine exceptionnelle.

 

Des couples, des amoureux dans les affres de la guerre, au cœur de massacres qui marquent l’aventure humaine, et ce à toutes les époques. Des volontaires, au péril de leur vie, font tout pour aider sur les champs de bataille, dans des situations qu’ils ont du mal à comprendre. Face à l’absurdité, des femmes, de génération en génération, risquent tout pour les autres, plongent dans des heures terrifiantes, cherchent un sens à une action qui exige toutes leurs énergies, leur imagination dans des tueries programmées par les états. Et des questions, comme des lumières fulgurantes, secouent l’être quand on se retrouve devant la vie qui glisse dans la mort ou le contraire.

 

«Serait-il conscient du moment de sa mort ou serait-ce comme la tombée de la nuit.» (p.23)

 

Et l’amour aussi, toujours, nécessaire. Total. Fou, triomphant dans le geste désespéré qui sauve un enfant ou un soldat, dans une rencontre où tout fusionne. Pareil à des météorites qui se heurtent et n’arrivent plus à se déprendre. Alors, ils deviennent un nouvel être dans leurs désirs et leurs idées, même quand ils sont séparés par un continent ou encore la mort. 

 

«Il avait insisté pour qu’elle reste. Surmontant à grand peine sa timidité, elle lui avait demandé s’il voulait se joindre à elle. Plus tard, elle lui raconterait le sentiment qu’il l’avait traversée, inexplicable, fugitif, pas même une pensée; s’il s’asseyait, elle allait partager une table avec lui pour le reste de sa vie.» (p.17)

 

Des individus se retrouvent dans un état de surconscience, dans des moments où tout peut arriver et qui tentent, avec leur intelligence et leurs savoirs, de comprendre le fait d’être et de mourir. Sans ces grandes âmes, la vie serait désespérante et sans espoir. Je ne peux m’empêcher de me tourner vers Albert Camus et son magnifique roman La peste. Il suit un médecin qui soigne les autres malgré l’absurdité de la situation. Ses interventions semblent bien inutiles.

L’humain trouve un ancrage dans cette absurdité et cette présence auprès des éclopés. Bien plus : c’est ce qui le définit peut-être le mieux. Il y a la brute, l’être barbare, mais aussi l’ange, l’être éthéré qui réussit peut-être à s'imposer.

 

LEÇON

 

Y a-t-il une leçon à tirer de la violence qui paralyse les esprits et qui prolifère un peu partout, surtout au moment où des fous prennent le pouvoir et entendent régenter la planète? Et il y a ceux et celles qui risquent leur peau en aidant les éclopés, comme nous le voyons en Ukraine et dans la bande de Gaza, où toute une population est réduite à l’errance et à la plus effroyable des misères. Qu’est la vie quand nul endroit ne permet le repos et qu’il n’y a plus de quoi nourrir son enfant, qu’un proche et un mari gisent sous les gravats?

Quelles certitudes trouver dans un monde qui se dérobe sous vos pieds? Pourquoi la bêtise suscite les gestes les plus généreux et les plus héroïques? Pourquoi ce besoin d’aller au bout de soi et de risquer sa peau? Pourquoi les folies destructrices et les déflagrations font ressortir le côté grandiose des humains? Et les morts ont-ils des choses à régler avec les survivants? Peut-il y avoir des rencontres et des contacts étonnants et imprévus?

 

«Un homme pouvait-il recevoir un signe qu’il était incapable de comprendre? Un esprit ne choisirait-il pas la manière exacte pour qu’un homme sache qu’il n’était pas le jouet d’un subterfuge? Il n’était pas crédule, il savait que nos besoins trouvent leurs propres façons, mais aucun spectre ne lui était jamais venu dans les tranchées, aucune apparition, malgré le besoin qu’il en avait eu. Peut-être ne reçoit-on jamais précisément que le genre de preuve qu’on est prêt à croire.» (p.57)

 

Comment représenter ou décrire ces instants uniques? Peindre ou arriver à surprendre l’invisible avec un appareil photo. Que reste-t-il dans un pays dévasté par les drones et les missiles, les bombes qui ont fait des villes des ruines jonchées de cadavres? Que reste-t-il de l’amour et de son bonheur quand la vie ne tient qu’à un fil et que tout peut s’arrêter dans un battement des paupières?

 

«Les morts ont tant de façons de nous montrer qu’ils sont avec nous. Parfois, ils restent délibérément absents afin de prouver leur présence en revenant. Parfois ils demeurent à proximité et puis ils disparaissent pour nous prouver qu’ils étaient avec nous. Parfois ils amènent un cheval jusqu’à un cimetière, un cardinal sur une clôture, une chanson à la radio TSF dès qu’on l’allume. Parfois ils amènent une chute de neige.» (p.59)

 

QUESTION

 

Anne Michaels interroge notre époque, et plus particulièrement le siècle dernier, l’un des plus meurtriers de l’histoire, avec des conflits qui s’engendrent et se répètent, et que personne n’arrive à neutraliser, malgré la bonne volonté de gens et de l’ONU muselée par les grandes puissances. Comment se manifeste le deuil et est-ce que les morts peuvent s’approcher pour nous souffler dans le cou d’une manière ou d’une autre? Que peuvent nous apprendre et nous enseigner ceux et celles qui ont été les victimes de notre déraison?

 

«Puis, alors qu’il développait la photographie d’une jeune veuve et de son nourrisson, un homme émana du fluide clair, lévitant au-dessus de la jeune mère, à moitié détourné, comme s’il avait été surpris en train de pleurer. Quand John montra la photographie à la jeune femme, elle chancela en apercevant son mari disparu, et tous les deux regardèrent le visage du mort avec une terrible joie.» (p.65)

 

La fascination troublante du danger et de la mort fait apparaître des forces insoupçonnées chez certains. Cela amène un homme et une femme à tout risquer pour sauver un enfant et apporter un peu de soulagement à la souffrance. Et peut-être aussi, en certaines circonstances, il peut y avoir des contacts avec des proches au-delà de la plus terrible des séparations. La question s’infiltre partout et hante les personnages d’Anne Michaels. 

 

«L’expérience avait appris à Mara que le surnaturel était purement la présence du bien, l’amour qui flambe libéré de la dépouille; toujours l’amour qui tente d’échapper à l’humaine épouvante.»(p.106)

 

C’est ça, Étreintes. Des moments et des événements qui soudent les vivants et les morts, qui abolissent le temps et créent des éclaircies où l’on peut espérer parce qu’une direction se dessine, qu’un lien impossible à défaire s’établit entre ceux qui ont succombé et les survivants. Des disparus rôdent pour que la vie reste une chaîne sans failles, malgré les horreurs et les folies.

 

«Peut-être la mémoire meurt-elle en même temps que nous. Peut-être s’évapore-t-elle, laissant derrière elle son sel. Quand une personne meurt, l’air lui-même change.» (p.145)

 

Les tableaux d’Étreintes questionnent l’aventure de l’être et de l’existence, les liens qui unissent les vivants dans une conscience élargie qui déborde les frontières du présent. Des discussions, des instants de fusion intense qui restent inoubliables, des rencontres où les êtres se retrouvent au-delà des déchirements. C’est ce qui fait que certains ne peuvent s’empêcher de courir vers les lieux de guerre, là où des femmes et des hommes souffrent et dépendent d’un geste qui va les sauver et peut-être aussi montrer une direction à cette aventure incompréhensible. 

Une fresque sur la famille humaine qui émerge dans les périodes les plus sombres, qui donne du sens à la vie de ceux qui ont dû agir dans des moments d’horreur, qui se sont battus pour la paix, pour le plus beau et le plus réconfortant chez les êtres humains : la fraternité. Un grand questionnement sur la vie, la mort, la présence de la mémoire qui permet d’abolir les frontières et de toucher les humains dans leur état d’être. Tout simplement magnifique.

 

ANNE MICHAELS : Étreintes, Éditions Alto, Québec, 208 pages.

https://editionsalto.com/livres/etreintes/

mercredi 25 septembre 2024

CES TRAGÉDIES DONT ON PARLE SI PEU

ANNE MICHAELS ne cesse d’étonner. Ses personnages, toujours intenses et curieux, permettent de nous glisser dans des moments qui traumatisent des populations et bousculent des manières de faire. Avery et Jeanne se retrouvent sur les lieux de grands travaux qui changent la vie de certains peuples et transforment leur pays dans LE TOMBEAU D’HIVER. L’ingénieur doit déplacer le tombeau de Ramsès d’Abou Simbel en Égypte. La construction du barrage d’Assouan force des centaines de familles à quitter leurs villages qui vont disparaître sous les eaux. Ils viendront aussi sur le chantier de la voie maritime du Saint-Laurent qui a touché le quotidien de milliers de personnes et tué une merveille de la nature : le Long Sault.


Avery est ingénieur, son père l’était également, et déplacer un temple comme celui de Ramsès d’Abou Simbel, dans le désert égyptien, n’est pas une mince affaire. Un travail colossal où il doit découper cette merveille ciselée à même une colline. Des millions de tonnes de pierre taillée en un véritable puzzle qu’il faut rassembler plus tard. Les équipes morcellent les sculptures avec une délicatesse de chirurgien, transportent ces masses énormes et replace le tout dans un autre espace. 

Avery se questionne cependant. Une cathédrale ou une pyramide perdent-elles leur essence en changeant de site comme les personnes qui sont forcées de migrer dans de nouveaux villages? Comment reconstituer un milieu de vie, les endroits où des humains sont nés, où les parents ont grandi et ont été enterrés? Un déporté reste un étranger dans son autre espace tout comme un temple devient quelque chose d’incongru sur un lieu différent. Un travail de sauvegarde, mais aussi une terrible tâche de destruction. Ces monuments trouvent leur essence et leur singularité en s’intégrant parfaitement à un environnement qui forge l’âme et donne un souffle particulier.

 

«La Nubie tout entière — cent vingt mille villageois, leurs maisons, leurs terres, leurs anciens vergers de dattiers entretenus avec soin et plusieurs centaines de sites archéologiques — s’évanouit. Même un fleuve peut se noyer. Évanoui lui aussi, sous les eaux du lac Nasser, reposait le fleuve des Nubiens, leur Nil, qui avait arrosé tous les rituels de leur vie quotidienne, guidé leur pensée philosophique et béni la naissance de tous leurs enfants pendant plus de cinq millénaires.» (p.25)

 

Je ne peux m’empêcher de songer aux travaux gigantesques qui ont changé le Nord québécois, aux chantiers de la Grande à la baie James qui a noyé 10000 kilomètres carrés de terrain, transformant un paysage à jamais, modifiant la vie des nomades et des bêtes qui y vivaient depuis des siècles, surtout les hardes de caribous. 

 

VÉRITÉ

 

De grandes prouesses d’ingénierie, mais aussi une terrible tragédie pour l’Égypte qui a forcé des populations à se déplacer, changeant leur manière de vivre et leurs rapports avec l’environnement, surtout le Nil. Bien plus, des traditions et des habitudes ont disparu, sans compter les conséquences dramatiques. Ces immenses réservoirs ont modifié la rotation de la Terre et sa trajectoire autour du soleil, altéré imperceptiblement le climat de tous les continents. Comme quoi notre planète est sensible à ce que les humains entreprennent sans trop réfléchir. Et que dire des animaux et de la flore? Que penser de la tragédie survenue en 1984 dans la rivière Caniapiscau où tout près de 10000 caribous se sont noyés en traversant le cours d’eau gonflé par la crue? Les Cris et les Inuits ont accusé Hydro-Québec d’avoir ouvert les vannes sans se préoccuper des bêtes migrantes. La société s’est dédouanée en parlant d’un phénomène naturel, mais que reste-t-il d’authentique dans un pays balafré par d’immenses barrages qui créent des lacs qui ont la dimension d’une mer? J’en sais quelque chose en résidant sur les rives du lac Saint-Jean qui a été donné à une entreprise américaine, il y a cent ans. Les barrages ont tout changé, faisant disparaître des terres agricoles et des espèces végétales (le cerisier des sables entre autres). L’érosion s’est accentuée, agrandissant la superficie du lac de plus de 21 kilomètres carrés depuis la hausse des eaux en 1926. 

Le barrage d’Assouan modifiera tout l’écosystème et dépossédera des centaines de milliers de gens de leur histoire, de leurs traditions, de leur milieu de vie et de leur façon d’être et de penser. 

 

AU QUÉBEC


Ce sera tout aussi spectaculaire avec la voie maritime du Saint-Laurent qui touchera l’essence du fleuve. Une merveille de la nature, le Long Sault, ce lieu qui a marqué notre histoire avec l’aventure de Dollard des Ormeaux à l’époque de la Nouvelle-France ne sera plus qu'un souvenir dans les livres d'histoire. Un phénomène grandiose que l’on a détruit pour faire passer des bateaux, pour le commerce et le transport de produits jusqu’au cœur du continent. On peut se demander à qui ces agressions contre l’environnement ont profité. 

 

«Le bruit des rapides du Long Sault était assourdissant : il avalait les mots dans l’air et tout ce qui se trouvait pris dans sa puissance. Sur près de cinq kilomètres, un lourd brouillard flottait au-dessus du fleuve, et même ceux qui s’en tenaient à bonne distance étaient trempés par les embruns. Les eaux bouillonnantes se précipitaient dans une gorge étroite en une descente graduelle de neuf mètres.» (p.50)

 

Imaginez que l’on érige un barrage et que l’on fasse disparaître les chutes Niagara. Ce serait un véritable sacrilège, un crime contre la planète et l’écosystème. Encore là, le Long Sault fut une catastrophe pour des milliers de personnes qui ont dû migrer en abandonnant tout leur passé derrière eux. On pourrait s’attarder à la création du parc de Forillon en Gaspésie qui a été une tragédie pour les habitants tout comme la fermeture de plusieurs villages dans les années 1970 dans cette même région du Québec. 

 

GUERRE

 

Dans la deuxième partie du roman, l’écrivaine décrit les traumatismes que les Polonais ont vécus pendant la Deuxième Guerre mondiale avec l’invasion allemande d’abord et l’arrivée des Russes qui étaient là prétendument pour les libérer. Des villes détruites et des gens qui doivent subsister dans les ruines et errer pour trouver quelque chose à manger. Ce n’est pas sans rappeler Gaza où l’horreur se répète jour après jour depuis bientôt un an et où la folie humaine s’exprime dans tous ses excès et ses entreprises. Les survivants de ces apocalypses sont touchés au cœur et à l’âme. 

Lucjan, un rescapé, un artiste ne peut s’empêcher de raconter son enfance et toute la souffrance qu’il a connues pendant sa jeunesse. Des années qui agitent son sommeil. 

 

«J’ai besoin que tu entendes tout ce que je dis, et tout ce que je suis incapable de dire doit être entendu aussi.» (p.247)

 

C’est surtout une formidable histoire d’amour entre Jeanne et Avery qui cherchent à se retrouver et à colmater les fissures de leur être, de donner un sens à leur existence dans ces lieux sacrés qu’ils ont contribué à détruire, privant l’humanité d’une partie de son passé et de ses beautés. Ce fut un désastre en Égypte et il y a eu aussi ces changements dramatiques dont on parle moins ou peu dans le Grand Nord du Québec. Jeanne et Avery sont conscients de participer à des entreprises qui transforment le vécu de tous. Le couple tente de trouver les mots pour dire ce qu’ils éprouvent, ce qu’ils ressentent et s’il est possible de protéger la planète, la végétation et les âmes en peine qui transportent leur malheur d’un continent à l’autre.

Un roman fabuleux qui conserve toute sa pertinence et sa modernité malgré le temps qui s’est écoulé depuis qu’Anne Michaels a publié ce texte. Certains ouvrages gardent leur actualité et leur acuité en se penchant sur les grandes catastrophes causées par les entreprises humaines. Une histoire à la dimension du monde, des tragédies provoquées par l’avidité de dirigeants et des secousses sismiques qui affectent tous les êtres de la Terre. Nous en payons le prix maintenant avec les changements climatiques.

Un roman de la parole, du verbe, du dire et de l’écoute aussi, de la compassion et de la résilience devant ces drames, des guerres immondes ou encore des projets qui sont censés améliorer le quotidien de tous et qui tuent des points névralgiques de la planète. 

Un regard sur des gestes et des entreprises qui laissent des cicatrices profondes que le temps ne peut effacer et qui modifient l’environnement et notre imaginaire. Le travail d’une écrivaine visionnaire qui ne cesse de nous bousculer. Une traduction magnifique de Dominique Fortier encore une fois.

 

MICHAELS ANNE : Le tombeau d’hiver, Éditions Alto, Québec, 400 pages. 

https://editionsalto.com/livres/le-tombeau-dhiver/ 

mardi 3 septembre 2024

LA TRAVERSÉE DE DOMINIQUE FORTIER

IL Y A DES LIVRES que je voudrais garder avec moi. Peut-être un roman sans fin, celui qui nous enveloppe dans un cocon de bien-être et de bonheur. Un voyage dans un univers étonnant, des personnages qui nous accompagnent dans la longue traversée d’une journée et de quelques arpents de nuit. C’est ce que j’ai ressenti dès les premières lignes de LA PART DE L’OCÉAN de Dominique Fortier. Je me suis attardé au début, y revenant une fois, deux fois pour me mettre en état de lecture, comme avant un marathon où l’on réveille les muscles avant l’effort. Pour m’imbiber de sa prose, de sa cadence avant de m’aventurer dans les éclaircies lumineuses, avec l’impression de me faufiler dans des mondes qui n’existent que pour moi. J’ai parcouru la page sept à voix haute à plusieurs reprises, pour la musique, son souffle et sa respiration qui vient, pareille à la courte vague qui monte sur le sable et bat en retraite. Je m’y suis senti chez moi, à l’aise, comme si l’écriture me portait et pouvait être la mienne. Un moment rare avec cette écrivaine que je lis depuis sa première parution en 2008, soit son étonnant DU BON USAGE DES ÉTOILES.

 

Dominique Fortier nous ouvre le monde de Nathaniel Hawthorne et d’Herman Melville, dans les années 1850, l’Ouest des États du Massachusetts et du Connecticut aux États-Unis. Il fallait un certain courage, pour ne pas dire une grande témérité pour s’aventurer dans les terres de Melville après la somme de Victor-Lévy Beaulieu. Son MONSIEUR MELVILLE, une épiphanie de mon ami, a paru en 1978, soit il y a 46 ans, bien longtemps avant le terrible silence qui fige maintenant l’écrivain des Trois-Pistoles. Dominique Fortier était alors une fillette qui s’amusait peut-être déjà à inventer des histoires.

Nathaniel Hawthorne est né en 1804 et Herman Melville en 1819. Les deux se sont croisés, surtout pendant que Melville était en train de rédiger MOBY DICK. On dit qu’il y travailla pendant plus d’un an et demi, ce qui me semble bien peu étant donné l’ampleur de l’ouvrage. L’édition de Penguin Books, édition de 2002, fait plus de 700 pages bien tassées. 

Melville a du mal à terminer ce roman qui l’obnubile et demande toutes ses énergies, comme s’il avait été avalé par le grand cachalot blanc qui obsède le capitaine Achab qui sillonne les océans sur le Pequod pour le retrouver.

Dominique Fortier garde la prose de Melville à l’œil, bien sûr, mais ce qui l’intéresse, ce sont les liens entre les deux écrivains qui habitent tout près l’un de l’autre pendant cette période. 

Et il ne faut pas avoir peur des mots. Les deux sont fortement attirés physiquement, surtout Melville qui ressent une véritable passion pour l’auteur de LA LETTRE ÉCARLATE qui est publié un an avant MOBY DICK. Pour Melville, c’est l’amour qu’il éprouve pour Hawthorne. Il est hanté par l’homme et ami, tout autant qu’Achab est obsédé par la baleine blanche. 

 

DIMENSIONS

 

Dominique Fortier ne se contente pas de raconter les émois de Melville devant son collègue, mais se tourne aussi vers une aventure qu’elle vit avec Simon, une péripétie littéraire (comment pourrait-il en être autrement), un désir qui restera au niveau du fantasme comme celui des deux Américains. Un jeu de miroir entre les personnages que deviennent Melville et Hawthorne, Fortier et Simon, un poète et la rédaction de son livre.

 

«Simon est apparu dans ma vie en hiver.

Il avait attendu que nous soyons séparés par l’océan Atlantique pour m’écrire : Cette nuit, j’ai rêvé à toi.

La table était mise. C’était à ce rêve qu’il écrivait. Et pendant des semaines, j’allais répondre à une voix sans visage s’élevant au milieu de la nuit comme la fumée d’une cheminée, la trace d’une présence, une chose qui dit : là, il y a quelqu’un, de la lumière, du feu.» (p.31)

 

Pour faire le tour de l’acte de création, Dominique Fortier fait appel à Lizzie, l’épouse de Melville qui transcrit les feuillets de son mari. Sa main d’écriture est parfaite, tellement, que l’on croirait qu’il s’agit d’une page imprimée. Des phrases qu’elle ne comprend pas toujours. Et quand elle intervient dans l’histoire, elle y va d’une écriture lisse, sans heurts, pareille à ce qu’elle est dans la vie. Une prose sans points ni virgules, sans lettres majuscules. Une coulée qui dérive avec l’eau de la rivière Saco. 

 

«… je ne serai jamais écrivaine non seulement je n’arrive pas à trouver les images mais même les mots m’échappent tout ce que j’arrive à tenir c’est ce que je peux sentir entre mes doigts cette plume une cuiller en bois les petits doigts de malcolm quand il s’endort comment fait-il herman pour ne jamais se laisser distraire quand il écrit…» (p.43)

 

Le cœur de cette aventure : l’amour de Melville pour Hawthorne et peut-être aussi l’attirance de ce dernier pour l’auteur de MOI ET MA CHEMINÉE. Cet attrait n’arrivera jamais à aboutir, tout comme Achab ne parviendra pas à tuer la baleine qui le hante. 

Une passion refoulée, un désir impossible. En plus, Lizzie est subjuguée par le ténébreux Nathaniel. Là, Dominique Fortier laisse aller son imagination.

 

«… c’est que cet enfant qui n’existe pas encore me fait peur pour une autre raison et s’il allait naître avec une paire d’ailes ou une paire de cornes la vérité c’est que j’ignore qui en est le père — la vérité c’est que je ne suis plus certaine d’en reconnaître la mère…» (p.304)

 

FRAGMENTATION

 


Ça peut sembler emberlificoté avec la fragmentation du récit qui se partage entre l’histoire de Melville et Hawthorne, les propos de Lizzie au je avec celle de l’écrivaine en train de bâtir son livre et des notations, comme des fiches épinglées ici et là pour nous informer sur le monde marin et les océans.

 

«Les méduses n’ont ni poumons ni branchies. Elles sont dépourvues de cerveau comme de cœur. Qu’est-ce que donc qui est essentiel à l’existence si elles peuvent tout de même naître, vivre, se reproduire et mourir? Peut-être simplement l’eau salée dont elles sont composées à près de quatre-vingt-dix-huit pour cent. Il n’est de nécessaire que l’océan en nous.» (p.97)

 

Bien sûr, il ne faut jamais oublier que nous sommes dans un roman et que Dominique Fortier exprime dans LA PART DE L’OCÉAN sa fascination pour la fiction, la lecture et tout ce qui fait qu’un livre apparaît, autant la vie et le temps que le romancier passe à rédiger son texte, le milieu qu’il arpente et qui le hante, avec ce lecteur anonyme et obsédant qui donne une figure autre aux personnages quand ils sont confiés à un éditeur. 

On s’en doute, Dominique Fortier s’appuie sur une correspondance entre les deux auteurs dont on ne peut lire que les missives de Melville. Toutes celles de Hawthorne ont été détruites, on ne sait pas qui. Tout comme on ne peut se pencher que sur les lettres de Kafka à Milena Jesenskà que Danielle Dussault tente de retracer dans L’EXPÉRIENCE MILENA. Les messages enflammés de cette journaliste et admiratrice du grand écrivain ont disparu. Dans les deux cas, personne ne peut dire qui a pris la décision de les brûler.

 

FICTION

 

Nous nous avançons dans des histoires où Dominique Fortier comble les trous avec son imaginaire et aussi la connaissance de son sujet qu’elle ne cesse de ressasser comme tous les écrivains qui travaillent à un roman ou un récit. Madame Fortier met les choses en perspectives à la toute fin de l’ouvrage.

 

«Toute ressemblance avec des personnes réelles ou ayant déjà vécu n’est évidemment pas que le fruit du hasard. Herman Melville et Nathaniel Hawthorne ont réellement existé, de même que leurs proches, et je me suis inspirée d’événements véridiques de leurs vies pour écrire les pages qui précèdent, tout en prenant quelques libertés avec la stricte chronologie. Pareillement, les pensées, les paroles et la plupart des actes que je leur prête sont le fruit de mon imagination et répondent à un désir de justesse plutôt qu’à un souci d’exactitude. De Lizzie, j’ai gardé le nom et le fait qu’elle a pendant un certain temps transcrit les manuscrits de son mari, et j’ai inventé le reste. Bref, avec tout ce que cela suppose de fidélité, de trahisons et de pas de côté, j’ai voulu faire de leur histoire — et de la mienne — une fiction.» (p.323)

 

Je me suis laissé bercer par la prose de Dominique Fortier, comme lorsque je m’assoupis par les jours calmes et chauds au bord du grand lac, quand la vague, toujours défaite et reprise, me pousse dans les cercles du sommeil ou encore dans la rêverie. 

C’est ce qui importe. 

Dominique Fortier présente une formidable lecture de MOBY DICK, ce roman si mal reçu à sa parution en 1851 et boudé par la critique. Il aura fallu la patience de l’eau et de la mer pour trouver la place que cette œuvre monumentale devait avoir dans la littérature mondiale.

La passion, un amour rêvé et inatteignable, certainement la quête de l’écrivain qui va en aveugle imaginant sa destination quand il sent le port s’éloigner et qu’il s’enfonce dans la brume où tous les chemins s’abîment. Le désir de Melville pour Hawthorne ne se concrétisera jamais dans des gestes, des mots, des bouts de phrases, le plaisir et la douleur, mais restera une poussée vers l’inaccessible, une forme d’idéal et de perfection qui peuvent vous détruire ou vous abandonner comme un spectre après avoir été propulsé hors de vous et des frontières connues. Personne ne sort indemne d’une telle aventure. 

La passion refoulée de Melville pour Hawthorne se moule à l’obsession du capitaine Achab qui vend son âme au diable pour retrouver le cachalot qui lui a volé un membre. Il est condamné à claudiquer sur le pont, avec sa jambe de bois qui marque le temps et qui va l’emporter corps et bien avec son équipage. 

C’est magnifique et hypnotisant ce roman de Dominique Fortier. Je m’en suis réchappé un peu croche, me retenant à tous les passages que j’ai soulignées en jaune, me laissant étourdir, soulever par la puissante écriture de l’auteure, tout comme Ismaël qui, après toutes les aventures, s’accroche au cercueil de Queegueg qui flotte dans les vagues comme un bouchon. La tombe, le dernier lit, devient la nacelle de vie et d’espoir. Un roman magnifique où Dominique Fortier donne sa pleine mesure encore une fois. Étonnant et subjuguant.

 

FORTIER DOMINIQUE : La part de l’océan, Éditions Alto, Québec, 328 pages.

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