Germain Nault, né en 1920, avait à peine dix-huit ans quand la Deuxième Guerre mondiale a éclaté. Un conflit que la population du Québec suivait distraitement, ne se sentant guère concernée par cet affrontement qui allait traumatiser le siècle. Le jeune homme s’enrôle, n’ayant jamais à l’esprit qu’il pouvait participer à la guerre en Europe.
Le jeune homme en débarquant
en Normandie, plonge dans l’enfer, voit des amis et des compagnons d’armes mourir.
Son témoignage fait vivre l’horreur de la guerre et ses monstruosités, permet
d’apprécier aussi la droiture d’un homme qui croyait en son destin.
Ce récit, écrit par ses petites-nièces
Marilou et Martine Doyon, devient passionnant quand le jeune militaire participe
au grand débarquement du 6 juin 1944.
Germain Nault conduit un char,
transporte des munitions, devient estafette, va d’un commandant à l’autre sur
sa moto pour transmettre les ordres, défiant les tirs ennemis et parfois même
ceux des alliés. Un travail particulièrement dangereux qui exige des nerfs d’acier.
Un peu casse-cou, il aime circuler
ainsi, se fiant à sa bonne étoile, ayant un regard sur le conflit tout à fait
particulier. Il sera témoin de scènes horribles, de carnages, verra ses
meilleurs amis mourir sous ses yeux.
«Des vies humaines s’éteignaient sous mes yeux
depuis le début des affrontements et je n’y pouvais rien. C’était intolérable.
C’était inhumain. C’était presque absurde. Et, pour me faire comprendre encore
davantage que la guerre était avare d’exemptions, ma vie a basculé lorsque j’ai
aperçu ce que j’appréhendais le plus depuis le début de notre calvaire :
en cette fin de journée du 6 juin 1944, en montant vers La Mare, le destin m’a
fait passer à côté du corps criblé de balles d’un ami, celui de Fernand Hains.
Je suis aussitôt descendu de mon véhicule, en espérant de tout mon être
percevoir un semblant de respiration dans sa poitrine, mais je me suis vite
rendu à l’évidence. Les balles ne lui avaient laissé aucune chance. Déjà, je
pensais à ses parents, à ce que j’allais leur dire.» (p.115)
Il risque sa vie tous les
jours, ne doute jamais de la justesse de sa mission. Il suivra les troupes
alliées qui progressent vers la frontière de l’Allemagne en livrant de
terribles combats, jusqu’à la reddition des forces nazies. Il aura vu
l’horreur, connu le pire tout en gardant sa foi dans l’humanité, en se rappelant
sa famille et sa mère.
«Je ne réalisais pas que
j’allais bientôt retrouver ma famille, mon village, ma petite routine au
Québec. J’ai pris soin d’envoyer une lettre à mes parents pour les avertir que
j’allais être de retour dans quelques jours. J’imaginais la sensation de
soulagement que ma mère a dû éprouver à lecture de mes derniers mots en
provenance d’outre-mer.» (p.211)
Germain Nault s’en sortira sans
trop de séquelles, peut-être parce qu’il a toujours refusé de ruminer des
événements sur lesquels il n’avait aucune prise. Il a su se concentrer sur le
chemin à parcourir et non pas sur celui qu’il venait de faire. Il rentrera au
pays, retrouvera sa famille, se mariera et connaîtra une vie bien remplie.
Un témoignage inspirant, un
travail respectueux des jumelles Marilou et Martine Doyon qui demeurent très
attentives aux propos de leur grand-oncle. On sent leur fascination pour ce
héros qui a frôlé cent fois la mort, un homme humble qui croit en l’humanité et
a su se préserver de tous les préjugés, même envers ses ennemis. Une vie pas
comme les autres qu’il fallait faire connaître. C’est bellement réussi.
J’ai survécu au débarquement, de Marilou
et Martine Doyon est paru aux Éditions JCL.
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