Tous en conviennent. «L’Osstid’show» a été un point tournant dans la musique et la façon de présenter un spectacle au Québec.
Bruno Roy dans «L’Ossstidcho ou le désordre libérateur», un essai fort bien documenté, le démontre parfaitement. Malgré une graphie différente, les deux auteurs parlent du même événement.
Carmel Dumas remonte au temps des boîtes à chansons pour plonger dans les spectacles multidisciplinaires, se permet des incursions côté cinéma, des médias, du théâtre et des arts visuels, tentant d’établir des liens avec ce qui se vit en Californie et en France. Une démarche globale et particulièrement ambitieuse.
Années folles
Au début des années 60, les frontières deviennent des passoires et la jeunesse du monde apprécie les mêmes musiques et cultive les mêmes révoltes. Le Québec vit alors des moments d’effervescence. Les compositeurs et les interprètes sont bousculés par les Beatles, les Doors, Frank Zappa et Bob Dylan. Les murs des boîtes à chansons ne peuvent supporter autant de décibels.
«C’est à cette heure magique, qui ne sonne qu’à des moments très distanciés dans l’Histoire, que remonte l’origine de L’Osstid’show, un des récits préférés d’un Québec entre chien et loup, un brin nostalgique de ses années lumineuses d’aventure et de conquête. L’histoire tourne autour d’une explosion artistique extraordinaire, provoquée par l’effet combiné des bombes posées par le Front de libération du Québec et des pétards circulant au hasard de la bohème psychédélique.» (p.7)
Spectacle unique
Carmel Dumas s’attarde auprès du noyau qui a donné «L’Osstid’show»: Mouffe et Louise Forestier, Robert Charlebois et Yvon Deschamps, mais c’est l’ensemble de la vie artistique de Montréal qu’elle tente de décrire à grands traits.
Autant le dire, j’ai souvent pris plus de plaisir à m’attarder aux photographies qu’au texte. Parce que quand Carmel Dumas s’excite quand elle cherche à décrire le réveil du Québec. Ses envolées font sourire.
«Montréal est une fille de port aux sangs mêlés dont les princes des églises, les rois de la finance, l’aristocratie des arts et lettres et les mandarins politiques se disputent férocement le lit. C’est flatteur, elle ne le nie pas. Elle adore qu’on la courtise et qu’on la complimente, que l’on accourt en grand nombre à ses fêtes et que l’on rêve des impossibles rêves en regardant virevolter ses jupons aux volants multicolores, taillés à même les oripeaux de ses éclectiques amants dont elle protège jalousement la parcelle d’âme qu’elle leur a dérobée durant leurs étreintes.» (p.46)
Plus de sobriété aurait mieux servi son propos. Peut-être aussi que son «point de vue global» était un pari impossible à tenir. J’y reviens, cette manière de dire donne l’impression que l’auteure écrit en apnée.
«À sa mort, (Maurice Duplessis) même s’il tenait encore la majorité des enfants de la belle province d’une poigne solide, le Chef avait presque totalement perdu le contrôle de Montréal. Elle se moquait ouvertement des conventions, faisant les poches aux hommes d’affaires anglophones et s’envoyant en l’air avec les Parisiens anarchistes, ces excentriques en rouge et en noir qui s’étaient amenés en même temps que la télévision, chantant à tue-tête « La mauvaise réputation » et « Le gorille » de Georges Brassens.» (p.48)
«Montréal show chaud», avec ses raccourcis et ses clichés, s’avère le document brouillon d’une groupie qui n’a pas su garder ses distances pour démêler les fils d’une époque pas comme les autres.
«Montréal show chaud» de Carmel Dumas est paru aux Éditions Fides.
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