Ronald Larocque a publié des nouvelles et enseigne la littérature au cégep de Saint-Hyacinthe. «L’homme qui lisait dans les mamelons et autres contes de l’émotion» est constitué d’une quinzaine de textes où l’imaginaire et la poésie se taillent un bel espace.
Un écrivain qu’aucune frontière ne semble vouloir arrêter et qui se grise des mots et des images que le lecteur voit s’épanouir comme de minuscules fleurs qui distillent la couleur. Elles éclatent avec les rires, étonnent et réchauffent l’âme. Une belle originalité.
Et si l’amour et la vie sont plus souvent qu’autrement au rendez-vous, la mort ne s’éloigne guère. Elle est là, brutale, impitoyable dans «Voler» ou «Cristalliser».
Réussite
Signalons «La femme aux pieds froids», certainement le texte le plus achevé et le plus évocateur du recueil.
«C’est une histoire qui prend racine dans les montagnes de l’Équateur et qui pousse à travers la terre pierreuse et noire d’un petit village quechua, pour ensuite venir fébrilement fleurir dans le cœur vivant de la modeste demeure de bois d’Antonio et d’Izarra. Ce village quechua, il se trouve du côté d’Otavalo et d’Ibarra, tout près de cette ligne fort imaginaire qui essaie de toute sa bonne volonté de séparer le monde en deux parties égales et de donner, dans la vie comme sur les cartes géographiques, un haut et un bas à l’Amérique et au monde.» (p.21)
Ajoutons «Le conte de la goutte» où il crée une belle magie avec le cycle naturel de l’eau. Signalons enfin «L’homme qui lisait dans les mamelons» et «Bouba» dont la finale est un peu faible. Un peu le problème de plusieurs textes qui manquent d’élan pour nous laisser sur le bout de notre chaise. Un quiproquo un peu facile aussi dans «Dilemme».
Oralité
Ronald Larocque fréquente le conte depuis des années. J’hésite à utiliser le terme parce que Larocque se tient plus du côté de la «littérature écrite» dans ce recueil de la très belle collection «Paroles» de Planète rebelle que de l’orature.
Il travaille plus comme un comédien qui mémorise ses textes, s’amuse avec des sonorités et des allitérations qu’il force un peu. Heureusement, il réussit à retenir ses élans la plupart du temps.
Reste qu’à l’écoute, l’auditeur perd la magie qui habite ses écrits les plus réussis. Le conte a d’autres exigences, il me semble, et ce que nous apprécions à la lecture, a du mal à se faufiler jusqu’à l’oreille pour la caresser et la chatouiller.
«L’homme qui lisait dans les mamelons et autres contes de l’émotion» de Ronald Larocque est paru aux Éditions Planète rebelle.
http://www.planeterebelle.qc.ca/auteurs/larocque-ronald