Des communautés surgissent autour d’une mine ou au cœur d’une forêt. Elles croissent à une vitesse folle et quand les ressources s’épuisent, ou que les profits deviennent moins attrayants, les multinationales partent installer le miracle ailleurs. Ces communautés désertées perdent leur âme. Le passé est alors ce qui peut garder une forme de cohésion sociale dans un lieu qui se désagrège peu à peu.
Le drame a été vécu dans certaines communautés du Nord. Pensons à Schefferville où tout était possible et à Lebel-sur-Quevillon où, depuis quelques années, des hommes et des femmes attendent que tout redevienne comme avant avec la réouverture de la papeterie. Le miracle est devenu un cauchemar, l’avenir une serrure dont a perdu la clef. Vitomir Ahtik, né en Slovénie, dans «La porte du nord», plonge le lecteur dans une réalité de plus en plus présente sur la planète et notre région. Au-delà des soubresauts de la bourse, des pertes d’emplois qui gonflent les statistiques, il y a des hommes, des femmes et des enfants qui sont broyés par des forces impitoyables.
Le drame a été vécu dans certaines communautés du Nord. Pensons à Schefferville où tout était possible et à Lebel-sur-Quevillon où, depuis quelques années, des hommes et des femmes attendent que tout redevienne comme avant avec la réouverture de la papeterie. Le miracle est devenu un cauchemar, l’avenir une serrure dont a perdu la clef. Vitomir Ahtik, né en Slovénie, dans «La porte du nord», plonge le lecteur dans une réalité de plus en plus présente sur la planète et notre région. Au-delà des soubresauts de la bourse, des pertes d’emplois qui gonflent les statistiques, il y a des hommes, des femmes et des enfants qui sont broyés par des forces impitoyables.
Refuge
Christian, un Québécois, a vécu la construction de l’oléoduc en Alaska. Il cherche un refuge pour oublier ses blessures, les humains et leurs appétits de bêtes féroces. Il débarque dans cette ville du nord qui a tourné le dos à l’avenir. Les mines sont fermées et le rêve s’étiole dans des ruines. «La porte du nord» est hantée par des humains qui ne savent plus quoi faire de leurs corps. Il y a bien un épicier et un aubergiste qui survivent grâce à l’alcool frelaté, un curé obsédé par Dieu et un instituteur qui voit ses rêves se noyer au fond d’un verre, rien ne réussit à retenir l’attention d’un jeune homme. Le quotidien s’est déglingué dans cette communauté repliée sur elle comme une bête blessée. Tous se méfient, surtout de ces étrangers qui peuvent secouer la marche des jours.
«C’est un peu comme dans un western : un gars bien bâti entre dans une ville, il marche seul, à pas lents. Il n’y a personne dans les rues, pas une seule tête aux fenêtres, les habitants se cachent, sur leurs gardes, se disant que si l’inconnu n’est pas venu pur tuer, régler une vieille rogne qu’il garde envers un des leurs, c’est sûrement pour les déposséder de quelque chose, même s’ils ne savent pas de quoi. Il aura beau ne toucher à personne et payer cash, il est venu les perturber.» (p.80)
Vie sauvage
Après avoir vécu de grands espoirs et cultivé les rêves les plus extravagants, la population se résigne à cette décrépitude.
«Ils ne vivent pas, ils survivent. Leurs sentiments ont gelé. Ils se débattent comme ils peuvent, pris dans les mailles d’un filet qui ne les lâche pas. Certains explosent, se font du mal à eux-mêmes. Personne ne partagerait quoi que ce soit avec ses voisins, encore moins avec quelqu’un venu de l’extérieur… Chacun garde en soi des rancunes, de la méfiance, quand ce n’est pas de la haine.» (p.33)
Même les adolescents rôdent comme des bandes de loups en terrorisant tout le monde.
Christian croise Rose, une femme qui a perdu son mari et ses enfants. Une histoire d’amour se tisse, un métis traverse la ville comme un ange exterminateur, des aventuriers ne reculent devant rien pour garder la main sur le trafic de l’alcool. Des obsédés, des fous qui ne croient en rien, des désespérés. Quand Christian accepte de livrer une cargaison d’alcool à une agglomération située plus au nord, il signe son arrêt de mort.
Confrontation
Le roman d’Ahtik nous plonge dans la désintégration sociale, là où la peur règne avec la méfiance. L’action pourrait se situer dans les régions périphériques qui se dépeuplent, dans ces villages qui voient leur population s’étioler parce que l’avenir s’est sauvé un matin. Ne reste que l’attente et le rêve qui ne reviendra jamais. Les hommes sombrent dans l’alcool, la violence et la bestialité.
Un roman dense qui, par un retour des choses, nous pousse dans les envers des miracles économiques, des développements qui déclenchent les rêves les plus extravagants. C’est tout le côté sordide de l’Amérique qui surgit, l’exploitation des ressources naturelles qui se transforme en drame. Des humains qui voient leur avenir leur être enlevé.
«La porte du nord» de Vitomir Ahtik est paru aux Éditions de la Pleine lune.