vendredi 11 mai 2012

Gilles Archambault nous laisse les larmes aux yeux

«Qui de nous deux?» de Gilles Archambault s’avère un récit particulièrement touchant et bouleversant. L’épouse de l’écrivain est décédée d’un cancer après quarante ans de vie commune. Une présence irremplaçable, une perte d’équilibre dans la vie de Monsieur Archambault. Autant dire qu’il a perdu une partie de soi.


Il ne pouvait réagir qu’en bousculant les mots pour apprivoiser cette «absence» qui le laisse perdu dans son corps et son esprit. Chacun des objets de l’appartement lui rappelle la présence de son épouse.
«Le passé, le nôtre, qui ne fut pas toujours rose, avait une réalité que le présent n’a plus. Je me sens amputé. J’ai perdu le seul être au monde avec qui je pouvais converser même dans le silence. Voilà pourquoi je sens le besoin de ne pas me taire.» (p.11)
Écrire pour garder sa présence, lui souhaiter encore de « beaux rêves » comme il le faisait à tous les soirs avant d’aller au lit.
«C’est tout simple, je n’ai qu’un désir, lui parler, la toucher. Je voudrais qu’elle soit présente, elle n’est plus que cendres. Je me déplace dans notre appartement. Tout me rappelle sa présence. Parfois, en me mettant au lit pour la nuit, je viens bien près de lui souhaiter de faire de beaux rêves. Je l’ai fait si longtemps.» (p.23)

Deuil

Gilles Archambault se souvient de leur première rencontre alors qu’il venait de quitter l’université et qu’il rêvait de livres et d’écriture. Après, il y a eu le travail, la famille, des voyages, des hésitations et des absences. Les écrivains s’égarent souvent dans leur tête.
Et ces années où le cancer a récidivé. La perte d’autonomie, la vie qui semble se recroqueviller pour n’être qu’une toute petite flamme qui vacille.
«Je me dirige vers ma mort. Tant que Lise était à mes côtés, il me semblait que l’irréversible pouvait attendre. Nous avions soixante ans, soixante-dix, des choses devenaient plus difficiles. Pour elle, de fréquentes alertes du côté de la santé. Le passé avait depuis longtemps jeté une ombre sur l’avenir, dont nous ne parlions qu’avec prudence. La perspective d’un voyage éventuel nous a souvent permis de vivre avec un peu moins d’angoisse.» (p.68)
Lise a fait face à la mort avec courage et dignité même si la maladie l’éloignait un peu plus à chaque jour.
Maintenant elle est là, tout le temps. Monsieur Archambault a placé des photos d’elle partout dans l’appartement. Elle a toujours été là même quand il partait pour son travail et qu’il prenait plaisir à s’attarder en France.
Que peut être la vie maintenant ? Un voyage à Paris où ils sont allés si souvent tous les deux. La ville qu’ils aimaient. Leur ville. Les souvenirs deviennent encore plus douloureux.
Un récit qui vous laisse avec les larmes aux yeux. Le témoignage d’un homme qui perd son équilibre, celle qui aura été une camarade, une complice dans le long voyage d’une vie.
D’une justesse et d’une vérité remarquable.

«Qui de nous deux?» de Gilles Archambault est paru aux Éditions du Boréal.

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