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vendredi 22 février 2013

Frédérick Lavoie visite l’envers du monde


 Frédérick Lavoie a fait les manchettes en 2006 en étant arrêté lors d’une manifestation à Minsk, en Biélorussie. Le jeune journaliste est devenu une célébrité en passant quinze jours derrière les barreaux. Dans «Allers simples, aventures journalistiques en Post-Soviétie», le globe-trotter raconte ce moment difficile, mais aussi ses pérégrinations dans l’ex-empire de l’Union soviétique qui a implosé en 1991. 

L’immense pays s’est fragmenté en de multiples républiques où des illuminés, des parvenus, tous issus de l’ancien appareil étatique communiste, ont imposé leurs lubies. La Lettonie, l’Estonie et la Lituanie, étrangement, ont tourné le dos aux régimes totalitaires pour adopter le modèle européen.
Frédérick Lavoie, après avoir perfectionné le russe à Moscou pendant un an, voyage dans ce monde qui n’arrive pas à trouver les chemins de la liberté et de la stabilité. Parfois, il se déplace en toute légalité, souvent il emprunte les chemins de la clandestinité et risque le tout pour le tout. Les affrontements et la répression sévissent dans à peu près tous les états.
«Le Turkménistan est l’un des pays les plus fermés de cette planète. Il est sous l’emprise d’une dictature aussi loufoque que cruelle. Les journalistes n’y ont pratiquement jamais accès, hormis pour des conférences sur l’industrie pétrolière et gazière. Je dois jouer au touriste naïf. Je veux mettre toutes les chances de mon côté pour obtenir un laissez-passer vers la «Corée du Nord d’Asie centrale». (p.138)
Il passe des jours en train dans le mythique Transsibérien avant d’atteindre l’Asie. À Vladivostok, les Russes et les Chinois se côtoient pour le meilleur et le pire.
Partout, des potentats prennent leurs fantasmes pour la réalité ; partout, il verra la misère des hommes et des femmes, l’avenir se replier devant des jeunes qui souhaiteraient changer des choses.

Le journaliste s’attarde auprès des étudiants, des révolutionnaires, des chauffeurs de taxi et… des militaires. Il préfère ceux qui luttent pour un morceau de pain, les vieilles femmes qui réussissent à garder une certaine cohésion dans des pays qui s’effritent.

Délire

Le président du Turkménistan a érigé des statues en or le représentant partout sur le territoire qu’il contrôle. Ce mégalomane a écrit un livre que le peuple doit mémoriser pour travailler, se procurer un permis de conduire ou un passeport. Le seul livre que l’on offre dans les librairies du pays.
Tous ne sont pas aussi dérangés, heureusement, mais tous pourchassent l’opposition, truquent les élections, jouent le jeu de la démocratie pour soutirer de l’aide financière aux Occidentaux. La Tchétchénie a connue une révolution et une répression sanglante. Que dire du Kazakhstan qui a vécu des expériences nucléaires pendant des années sous le régime soviétique ? Toute une population touchée et tenue dans l’ignorance. L’horreur dont on ne parle jamais à la télévision.
D’autres dangers pointent avec la multiplication des croyances qui remplace les diktats du communisme. L’intégrisme islamiste surtout.
Frédérick Lavoie montre la face cachée du monde. Un récit fascinant. J’ai lu Allers simples comme un roman d’aventures. Une belle façon d’échapper aux formatages des médias pour nous montrer des gens qui vivent, souffrent, rêvent, se débattent pour un avenir meilleur même quand tous les horizons sont cousus de barbelés. À parier qu’il saura nous surprendre avec son regard sur l’Inde puisqu’il vient d’y migrer.

«Allers simples, aventures journalistiques en Post-Soviétie» de Frédérick Lavoie est paru aux Éditions La Peuplade.

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