Jean-Claude
Germain poursuit sa mission d’informer et de vulgariser l’histoire du Québec. Avec
la suite de «Nous étions le nouveau monde», l’historien s’attarde à la période
qui mène aux révoltes des Patriotes en 1837. Un moment fort important de notre
passé que l’on a souvent occulté.
Après la Conquête, tout bascule. Les francophones
sont privés du continent américain et enfermés dans ce que nous nommerons le
Bas-Canada qui deviendra la province de Québec. Une sorte de réserve. Commence
alors une lutte pour faire reconnaître la légitimité des élections, des élus, les
pouvoirs de l’Assemblée législative et ses responsabilités. Jean-Claude Germain
réussit l’exploit de rendre cette période passionnante. Une belle leçon de
choses qui garde sa pertinence en ces temps d’enquêtes sur la corruption et les
abus de toutes sortes. Un moment de notre histoire qui ne me passionnait guère
quand j’étais sur les bancs de l’école, il faut le dire. Autant je raffolais
des aventures des découvreurs, autant les luttes parlementaires m’ennuyaient.
Le
rapport honni
Il y a d’abord le fameux lord Durham, un rapport
qui est resté de travers dans la gorge de tous les francophones.
«Au Québec, l’Histoire est née sous la forme d’une
riposte à un camouflet d’un aristocrate anglais. Lord Durham avait statué en
1839 qui nous étions «un peuple sans histoire et sans littérature». C’était
d’autant plus insultant que c’était vrai.» (p.12)
François-Xavier Garneau écrira l’histoire des
francophones pour clouer le bec de l’aristocrate. Pour la littérature, il
faudra attendre. C’est surtout la lutte pour la reconnaissance de la démocratie
qui retient l’attention de l’historien.
Les francophones exigent le respect de la
législature, le pouvoir de voter les lois et les crédits. Ce que les
Anglophones refusent. Les gouverneurs se comportent en tyrans et dépensent les
fonds comme ils l’entendent. Conséquences : des élections à répétition. Le
représentant du roi avait le droit de proroger l’assemblée des élus. Un mot que
nous avons retrouvé, il n’y a pas si longtemps, avec notre ami Stephen Harper.
Longue
marche
Une longue marche vers l’idée d’indépendance
s’amorce, la révolte, une guerre perdue d’avance. Les rebelles ne possédaient que
quelques fusils pour affronter une armée bien équipée et disciplinée. Sans
compter les délateurs et le rôle du clergé qui se range du côté des Anglais. Suivra
une répression sauvage, des déportations et des exécutions. Des figures ressortent,
selon Germain, Louis-Joseph Papineau, un véritable héros avec de Lorimier.
«Chaque fois qu’une affirmation encore plus forte
de notre identité politique lui fait écho, l’ombre de Papineau s’agrandit à la
taille de l’indépendance.» (p.290)
La résistance fait courir les foules de « canayens
» qui confrontent les radicaux britanniques. Ces derniers affirment haut et
fort que les francophones sont des conquis et qu’ils doivent s’assimiler.
L’auteur fait aussi un parallèle avec l’Irlande qui a subi à peu près les mêmes
sévices que les Québécois francophones. Et que dire du rôle du clergé? Mgr
Plessis fait frémir.
Jean-Claude Germain démontre que nous ne cesserons
de revivre certaines batailles tant et aussi longtemps que le Québec ne fera
pas un choix définitif sur son avenir. Je n’ai pu m’empêcher de songer au printemps
2012 avec les marches dans les rues et des leaders étudiants qui réclamaient le
droit à la désobéissance civile. Papineau aurait sans doute approuvé et porté
le carré rouge.
«Nous
étions le Nouveau Monde» de Jean-Claude Germain est paru aux Éditions
Hurtubise.
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