Pauline Michel a cru bon de demander un texte de présentation à Marie-Claire Blais pour «Le papillon de Vénus». Un procédé qui demeure périlleux parce que l'auteure se met beaucoup de poids sur les épaules. Le lecteur s'attend à s'aventurer dans un texte exceptionnel.
Pauline Michel possède le sens de l'image mais il en faut plus pour partir sur les traces d'«Alice au pays des merveilles». Si les débuts sont prometteurs, j’ai déchanté rapidement, hélas. Emma adulte perd de sa magie et devient une enfant un peu égarée que le monde écrase.
Le hic vient surtout du rythme donné au récit. Pauline Michel nous entraîne à une vitesse foudroyante dans le temps, ne nous permettant jamais de nous arrimer au personnage pour le sentir, le voir, le respirer et y croire. Emma reste une sorte d'image qui permet à l'auteure de jouer avec les phrases sans jamais s'attarder au dur labeur de construire un monde et de l'étoffer. Emma a cinq ans au début du récit et il faut à peine dix pages pour la retrouver à l'âge adulte, blessée par un grand amour et une déception qui ne la quittera plus.
«Emma passe quinze ans à vivre ainsi, sans autre présent que la contemplation de la nature et sans illusion sur l'avenir. Elle range sa vie dans la pénombre. Chaque chose à sa place et une place pour chaque chose. Des heures pour le travail. D'autres pour la danse. D'autres pour le chant. D'autres pour les rencontres. Le monde perd toujours plus de son pouvoir de beauté.»(p.25)
Le merveilleux ne gonfle pas et nous restons à la surface des choses. Le papillon qui mute nous fait songer aux voyages de Dorothy au pays du «Magicien d'Oz» ou à «Alice au pays des merveilles», mais rien de plus. Les chaussures sont grandes pour Emma qui n'a pas la force, la consistance qu'il faudrait pour suivre ces illustres fillettes qui se sont confrontées à des mondes magiques et toujours en mouvance. Bien sûr, il y aura la lumière, la connaissance peut-être, l'amour et la paix mais cela reste conceptuel et virtuel. «Le petit Prince» n'a pas à s'inquiéter, Emma ne viendra pas bouleverser sa planète. La fable tourne court et s'enlise dans des images un peu plaquées.
Il manque un fluide, une chaleur, une magie à ce texte, une folie peut-être qui va au-delà des phrases joliment sculptées.
«Le papillon de Vénus» de Pauline Michel est paru aux Éditions Vents d'Ouest.
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