Qu’est-ce qui unit des intellectuels comme Arthur Buies, Edmond de Nevers, Édouard Montpetit, Lionel Groulx et Jean-Charles Harvey? C’est la question que l’on peut se poser à la lecture du dernier ouvrage de Gérard Bouchard.
«Tous ont un même idéal pour leur peuple. Ils évoquent la mission des francophones en Amérique et en même temps ils ont des propos très durs envers les Canadiens français. Lionel Groulx parle de «lâches», de «mous», de «peureux». Les quatre aussi prônent le relèvement de leur société. La Conquête a été une blessure qui a laissé le pays à la dérive. Il faut se relever et s’affirmer», explique Gérard Bouchard en entrevue.
Les cinq affirment ou à peu près que la Constitution de 1867 a en quelque sorte réglé le problème et qu’il ne reste plus qu’à prendre sa place. Jean-Charles Harvey effleure l’idée de la souveraineté mais il se reprend très vite. Tous voient le Québec dans la Confédération et même temps ils voient bien que les francophones sont menacés. «Les solutions sont différentes mais tous se retournent vers l’agriculture ou l’occupation du sol. Tous prônaient l’industrialisation, l’éducation même s’ils refusaient un ministère de l’Éducation. Jean-Charles Harvey a défendu cette idée. C’étaient les valeurs qui ont fait la Révolution tranquille quand on y pense», reprend Gérard Bouchard.
Tous voulaient sortir du carcan de la vallée du Saint-Laurent. «Edmond de Nevers prônait l’union avec les États-Unis et même avec le Mexique. Des états francophones ici et là qui correspondaient plus ou moins à la Nouvelle-France. Arthur Buies flirtait aussi avec l’idée de s’annexer aux Américains. De Nevers a prôné le contraire aussi. S’il y avait eu des décisions de prises, le Québec aurait pu s’affirmer comme il l’a fait à la Révolution tranquille mais beaucoup plus tôt. On peu le présumer», renchérit le chercheur.
Conditions de vie
Gérard Bouchard reste très sensible aux conditions de vie du peuple francophone au début du siècle dernier. La mortalité infantile dans les villes et dans les campagnes. «Une des plus élevée du monde», dit-il. Les conditions sanitaires étaient quasi inexistantes. L’eau, les égouts en ville, c’était primaire. On vivait comme au Moyen Age dans certains quartiers de Montréal. Il y avait aussi l’analphabétisme. On parle de 70 pour cent et plus d’analphabètes alors. Un sacré problème mais on ne voulait pas imposer la scolarité», explique-t-il.
Chose certaine la lecture de cet ouvrage permet de mieux comprendre le Québec d’avant et aussi le Québec de maintenant.
«Après le référendum de 1980, certains éléments de cette pensée équivoque ont refait surface mais pas d’une manière systématique», conclut Gérard Bouchard. Un essai fouillé qui permet de mieux comprendre certains comportements et de voir d’un autre œil certains discours qui reviennent au jour le jour dans les tribunes publiques.
«La pensée impuissante» de Gérard Bouchard est paru aux Éditions du Boréal.
http://www.editionsboreal.qc.ca/catalogue/auteurs/gerard-bouchard-758.html
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