Nombre total de pages vues

jeudi 6 novembre 2025

SYLVAIN GAUDREAULT DESSINE L’AVENIR

LA PLANÈTE va plutôt mal. Multiplication des catastrophes comme le dernier ouragan Mélissa qui a ravagé la Jamaïque et les pays voisins. Feux de forêt impossible à contrôler, pluies diluviennes et épidémies d’insectes avec de terribles sécheresses. Que dire des canicules qui rendent les villes étouffantes? Tout le monde le vit, mais qui est prêt à changer ses habitudes? Nous savons ce qu’il faut faire pourtant. Comment expliquer alors qu’à peu près tous les élus abordent le sujet du bout des lèvres et répètent les mêmes rengaines à propos de la richesse et de l’économie, c’est-à-dire de continuer à polluer et à accélérer le réchauffement de la planète? Sylvain Gaudreault, ex-politicien et député de Jonquière, ministre dans le gouvernement Marois et chef du Parti québécois par intérim, directeur général du Cégep de Jonquière maintenant, mène une croisade depuis quelques années. Il publiait «Pragmatique» en 2021 et il récidive avec «Ruptures et révolution», un essai où il propose de renouveler nos façons de faire et de voir. Un changement de cap pour faire face aux bouleversements climatiques, ramener les pendules à l’heure en tenant compte de certains événements qui ont secoué le monde, soit l’épidémie de COVID-19 et les conflits armés. De véritables sonnettes d’alarme.

 

Sylvain Gaudreault, dans cet essai simple, clair et accessible, aborde les grands défis que représentent les changements climatiques. Impossible de fermer les yeux et de le nier : les catastrophes ne cessent de se multiplier et de détruire des villes et des pays entiers. Tout politicien conscient et responsable ne peut rester indifférent devant ces cataclysmes planétaires. Parce que, après tout, tout homme ou femme qui sont élus lors de scrutins libres a le devoir d’assurer la sécurité sur son territoire et l’avenir des jeunes générations. Alors, comment contrer la montée des intégrismes, la dévastation orchestrée de Gaza, la guerre en Ukraine et la croisade des dirigeants des États-Unis pour faire régresser l’humanité?

Sylvain Gaudreault met cartes sur table rapidement et nous indique sur quoi il va insister.

 

«J’ai retenu trois événements qui nous font réaliser que cette idée de liberté et d’insouciance, que cette ère des utopies, était bien superficielle :

    1. La crise climatique;

    2. La pandémie de COVID-19;

    3. Le retour des guerres en Ukraine et au Proche-Orient.

Nous pourrions en ajouter plusieurs autres. Je pense notamment aux attentats terroristes du 11 septembre 2001, à l’invasion des réseaux sociaux dans nos vies, à la révolution de l’intelligence artificielle, à la réélection de Donald Trump, à la fin de la domination occidentale sur les affaires du monde et à l’émergence de la Chine comme acteur de premier plan en ce domaine, etc.» (p.20)

 

«Rupture et révolution» propose une action qui se déploie sur trois grands axes : climat, pandémie qui a paralysé la planète pendant des mois et ces guerres de plus en plus violentes qui rendent la situation mondiale inquiétante. Personne ne peut demeurer indifférent devant ces conflits où des femmes, des enfants et des gens âgés crèvent sous les bombes ou encore n’arrivent plus à se nourrir. Des décisions difficiles et exigeantes s’imposent pour faire face aux dégâts de l’économie de marché et aux manœuvres des multinationales qui échappent à toutes les lois et qui accumulent des profits sans jamais payer leur juste part aux sociétés.

 

«Je crois que la période actuelle s’apparente à une crise dans laquelle le vieux monde se meurt et le nouveau qui le remplacera tarde à apparaître. Nous sommes dans la période transitoire, comme entre deux chaises, laissant place à l’incertitude et à la montée des leaders négatifs qui occupent le vide avant la prochaine période stable.» (p.24)

 

Autrement dit, faire en sorte de domestiquer l’économie pour qu’elle profite aux populations et non pas à quelques privilégiés, protéger l’environnement, remettre le «nous» à l’avant-scène et calmer la frénésie du «je» qui se livre au saccage et trouve, dans les médias sociaux, un canal parfait pour répandre la haine et la zizanie. Agir afin de ralentir le réchauffement de la planète et d’amoindrir les phénomènes climatiques et les catastrophes qui obligent des peuples à migrer dans des pays d’accueil qui deviennent de plus en plus hermétiques. Un travail titanesque, Sylvain Gaudreault en convient. 

 

TRANSITION

 

Les élus doivent planifier la transition entre une logistique de gaspillage et de consommation boulimique vers une économie responsable qui ne largue personne en chemin. Comment revoir l’exploitation des ressources naturelles, régénérer des régions dévastées, oublier les énergies fossiles pour des énergies propres, repenser l’agriculture industrielle qui tue les sols, la forêt surexploitée et ravagée par des feux incontrôlables, l’eau potable de plus en plus rare et réduire une pollution galopante? Autrement dit, il faut entreprendre une «vraie révolution», muter dans nos têtes et dans nos habitudes. 

Pour y arriver, Sylvain Gaudreault propose de reformater l’État-nation. C’est le seul organisme ou gouvernement qui peut répondre rapidement aux besoins d’une population sur un territoire précis. L’État-nation peut parvenir à éliminer la pauvreté et l’indigence, mieux redistribuer les richesses entre tous et rendre les services aux gens efficaces. Pour cela, il faut mettre un frein au capitalisme sauvage et domestiquer les multinationales qui pillent les ressources naturelles. Surtout ces prédateurs du numérique qui échappent à toutes les lois et toutes les obligations.

 

«L’administration publique québécoise n’est pas adaptée à l’urgence climatique. Les mesures gouvernementales sont encore très fragmentées, alors que l’action climatique commande des politiques transversales. Les ministères et les organismes publics sont comme les tuyaux d’un grand orgue : ils sont séparés l’un de l’autre et ne communiquent pas entre eux. Le climat, en revanche, a un impact sur l’environnement, bien sûr, mais aussi sur la santé, l’énergie, les transports, les ressources naturelles, les affaires municipales, les finances, l’économie, l’agriculture… L’action climatique exige de briser les tuyaux du grand orgue.» (p.53)

 

C’est un vaste programme qui nécessite une véritable mutation de nos façons de faire, de penser et d’agir. Un défi terrible! Quoi de plus emballant pourtant que de travailler à sauver notre planète et à assurer l’avenir de tous?

 

DEVOIR


Ce projet de Sylvain Gaudreault est devenu nécessaire avec les avertissements que la Terre nous sert depuis des décennies. Des mesures urgentes doivent être prises parce que les spécialistes le répètent : les humains jouent avec le feu depuis trop longtemps. Même qu’un environnementaliste comme David Suzuki croit qu’il est trop tard et que nous avons franchi la ligne du non-retour. 

Sylvain Gaudreault ne se tourne pas vers le passé. Il se concentre sur le présent pour atténuer les bouleversements à venir et assurer un meilleur partage des ressources.

La prudence et une pensée politique responsable, une vision globale qui repose sur les États-nations qui peuvent modifier le cours des événements? Et, faut-il le répéter, nous avons une seule planète où vivre et nous n’en trouverons pas d’autres où migrer. Le bon sens veut que nous fassions tout pour protéger notre demeure. 

 

TRAVAUX

 

De grands chantiers se dessinent dans l’esprit de Sylvain Gaudreault. Des questions doivent nous hanter. Comment accueillir les réfugiés climatiques de plus en plus nombreux au cours des années à venir; comment mettre fin aux guerres et aux génocides, aux folies meurtrières des fanatiques religieux et à la course aux armements? Étrange d’investir dans les bombes quand des populations entières ne mangent pas à leur faim. 

Tous, collectivement, nous avons ce devoir et cette obligation de réagir afin que l’avenir soit possible pour tous. Le temps de l’insouciance et de la consommation effrénée est terminé. Le temps de la responsabilité vient de sonner.

 

«L’être humain a une grande capacité d’adaptation. L’histoire universelle l’a démontré. La question réside davantage dans notre capacité à sortir de notre paradigme confortable pour saisir le contexte actuel — qui n’est pas que conjoncturel mais bien structurel — afin de changer notre mode de vie. Cela est tout un chantier, j’en conviens!» (p.115)

 

Voilà un manifeste que le Parti québécois devrait faire sien pour proposer un vrai projet de pays qui se tourne vers l’avenir et qui peut être un chef de file qui œuvre à rendre la planète plus habitable et juste pour tous. 

Un essai important, lucide, qui devrait nous faire réfléchir, surtout les leaders politiques qui se contentent trop souvent de ressasser des formules creuses ou de semer le chaos comme on le voit chez nos voisins du Sud. 

Après avoir rêvé les grands échanges internationaux, nous devons revenir au plus proche, à des territoires naturels où les populations se sentent responsables et concernées. C’est pourquoi l’indépendance du Québec trouve sa place dans les questionnements de Sylvain Gaudreault. Des états forts pour changer son espace et par ricochet le monde.

Un manifeste nécessaire, un programme politique ambitieux, une voix qu’il faut écouter dans la cacophonie médiatique où tous critiquent sans jamais fournir de solutions. Sylvain Gaudreault propose une révolution pour assurer l’avenir et certainement permettre la survie des humains. Si la planète peut continuer sans nous, les humains ne le peuvent pas. La Terre est notre seul lieu. 

 

SYLVAIN GAUDREAULT : «Rupture et révolution», Éditions Somme toute, Montréal, 2025, 136 pages, 19,95 $.

  https://editionssommetoute.com/auteur/sylvain-gaudreault/

Aucun commentaire:

Publier un commentaire