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jeudi 14 août 2003

Voyager autour de soi comporte des risques

Sylvie Massicotte en signant «Au pays des mers» offre un ouvrage qui aurait très bien figuré dans la belle collection «Écrire» des Éditions Trois-Pistoles. Tout y est ! Un thème, une piste de réflexion, un lieu pour l’écriture, une fascination pour les bords de mer où les rencontres et les hasards peuvent se bousculer. Parce que devant la mer, la réflexion vient avec la vague et le ressac. Sylvie Massicotte, avec ce texte tout en questions et en regards, fait oublier les frontières. Nous la suivons sur les routes de l’écriture et jamais nous n’avons envie de rebrousser chemin. La contemplation de l’horizon, une journée particulière évoque les pays de l’enfance. Nous basculons dans un texte de fiction qui devient le galet qui capte le regard. Parce que la mer c’est le temps aboli, le temps renouvelé, l’espace qui se défait et s’ouvre à la vie et aux traces qui marquent le corps. Ces signes et toutes ces petites cicatrices, ce sont la matière du texte après tout. C’est la limite du rêve et de la réalité, la frontière du présent et du passé.
«L’écriture que je pratique part du principe que le lecteur est intelligent. Capable de déduire. C’est précisément pendant qu’il est en train d’extraire l’information, au fil de la lecture, qu’il sentira un inconfort semblable à celui éprouvé par les personnages eux-mêmes déstabilisés dans un moment de leur existence. Cette expérience va bien au-delà de l’histoire racontée.» (pp.50-51)
Déduire, peut-être avons-nous la clef de Sylvie Massicotte. Aller au-delà pour sentir, pour voir, pour trouver le sens et les sens.

Matière

Tout peut servir. Un voyage effectué il y a des années qu’il faut reconstituer à grands coups de mémoire, une conversation qui a changé l’écriture et le regard; un texte qu’on a laissé comme un caillou pour ne pas s’égarer. Sylvie Massicotte s’accroche à des extraits déjà publiés et les insère dans son texte pour montrer le vécu qui se transforme en fiction. Parce que le voyage, c’est toujours la direction du texte, les pas qui rapprochent de soi dans une danse un peu étrange.
Comment résister ?
Le lecteur, tout autant que l’écrivaine, réfléchit à l’art de dire et de vivre. Des questions justes et pertinentes, des pistes qui nous font entrevoir la femme et son univers. Chapitres courts, esquisses au fusain presque, Massicotte construit un puzzle qui nous ouvre un jardin discret et fascinant.
«Il y a ce que je me suis fait vivre pour écrire. Il y a ce que je ne me fais plus vivre, pour écrire quand même. L’écriture passe la première. De temps en temps, je la repousse. C’est est assez. Cette fois, ce sera moi. Je traverse une période sans mot, comme l’été où je me suis surtout occupée à organiser des ateliers pour mieux parler d’elle : l’écriture.» (p.21)
Un livre à relire, une écriture juste, des rencontres marquantes comme celle de l’écrivain Denis Bélanger à qui je dois des bonheurs de lecture.

«Au pays des mers» de Sylvie Massicotte est paru aux Éditions, Leméac.

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