Les écrivains, souvent, pour guérir d’un deuil, font des livres. Je songe à Pierre Monette et à Francine Noël. Les deux ont signé des récits exceptionnels.
Maud Goulet a vu sa mère combattre un cancer et dépérir. «Celle qui ne mourrait jamais» a dû abdiquer malgré son énergie et sa volonté.
Après ces moments difficiles, les enfants ont dû exercer le métier de vivre. Madame Goulet est demeurée longtemps sans remuer ce départ par peur de raviver sa peine. Il a fallu dix ans avant qu’elle ne se penche sur les traces de cette mère inventive, étourdissante de gestes et de projets. Un voyage, un paysage aux couleurs fauves à l’entrée de la Vallée de la mort, déclenchera cette méditation.
«C’était bouleversant: le désert n’était donc pas désert; il était vivant et si fort dans le silence du regard qu’on l’emporterait avec soi en partant. J’ai pensé à la couleur de ta peau, à tes cheveux, à tes yeux tels qu’ils avaient été avant… Tout ce qui est beau m’a toujours fait penser à toi… Tu me revenais intacte, pour la première fois depuis ta mort, sans que ton sein et ton bras blessés, ton crâne dégarni ne fassent d’ombre sur ta mémoire.» (p.80)
Souvenirs
En une dizaine de textes, Maud Goulet revit les excursions qui ont marqué les étés de son enfance. Un regard amoureux sur la vallée du Richelieu, tout près du village de Saint-Ours. Des promenades, des maisons en pierre ramènent des émotions et des souvenirs. Elle évoque cette mère enseignante, peintre, amoureuse et battante. Maud Goulet s’avère une fine observatrice de la nature et des oiseaux. L’occasion aussi d’effleurer les morts qui ont heurté sa vie. Les grands et petits deuils qui sédimentent l’être.
Livre sympathique, attachant même si l’auteure prend toujours le chemin le plus long pour effleurer un souvenir. Un peu de complaisance aussi dans une morosité qu’elle cultive au saut de la quarantaine. Une tendance à vouloir tout préciser quand une simple évocation aurait fait le travail.
«Maman? C’est le printemps…» de Maud Goulet est paru aux Éditions du chevalier de saint-œil.